lundi 27 juillet 2009
DARK HERESY – A PATH OF VENGEANCE, RESUME PART. 2
L’embarcation glisse sur les eaux sombres, forme fugitive et indistincte… Assis à l’avant, un matelot brandit une lanterne, scrutant l’obscurité. Debout à l’arrière, un bateleur guide l’embarcation à travers les flots incertains du marécage. Si quelqu’un avait été là pour la regarder depuis la berge, à travers les lambeaux de brume, il aurait pu croire au passage de la barque du Passeur, avec à son bord, des spectres voués aux rivages lointains. Et tel était le cas, en réalité. Car un fantôme s’y tenait, enveloppé d’un manteau sombre et ses yeux inflexibles braqués sur leur destination.
Derrière lui, un homme d’une quarantaine d’années était assis sur une planche. Il avait la mine sombre et le regard troublé, et l’une de ses mains gantées était crispée sur le bastingage. En se retournant, le spectre remarqua son inquiétude, même dans la lueur blafarde. Et il avait bien raison, car c’était bien la mort qui les attendait si leur entreprise venait à échouer. Un instant, le visage du spectre, encore dissimulé sous son capuchon, sembla se renfrogner.
Non… Ils ne pouvaient échouer.
Leur victoire ou leur chute dépendrait de la réunion à venir. Etaient-ils seulement venus ? Un sombre doute vint obscurcir son esprit. Etait-ce un piège ? Quelques souvenirs fuyants se frayèrent un chemin dans son esprit. Son sourire. Le vent passant dans ses longs cheveux noirs… Non, il se devait de lui faire confiance. Rhozena savait ce qu’elle faisait.
Bientôt, ils virent le débarcadère se dévoiler à travers les nappes de brouillard. Deux hommes en armure se tenaient sur le ponton de bois branlant. L’un d’eux alluma une lanterne, qu’il brandit au-dessus de leurs têtes, révélant l’écusson qu’ils arboraient sur leur plastron. Des hommes de la Maison Merrywood… La main du spectre descendit doucement vers son arme. Peut-être aurait-il dû se faire escorter par quelques hommes de la milice Blackstone…
La barque accosta sans un bruit. Le spectre entendit derrière les soldats des chevaux renâcler, et vit un troisième homme à cheval, tenant dans sa main la bride de quatre autres montures. Il attendit un instant, guettant les ténèbres alentour. Rien d’autre que le silence…
Il posa le pied sur le ponton, suivi de son compagnon. Rigorus Tilt semblait avoir dompté ses craintes, son visage était désormais calme et ses gestes posés…
Rigorus Tilt. Son précepteur. Son mentor. Suite à son exil sur Reshia, il était venu le voir chaque année pendant sept ans, payant d’immenses sommes pour ces voyages interstellaires. Pendant les semaines que durèrent ses séjours, Tilt le forma, lui enseigna les bases du pouvoir… Tout ce qu’il devait savoir lorsque son heure viendrait de reprendre le trône. Il lui en était reconnaissant. Ces voyages devaient constituer de lourds sacrifices…
Lorsqu’il fut âgé de seize années, c’est ce même Tilt qui avait planifié son évasion du monastère, et lui avait donné les premières pistes et les premiers contacts pour fomenter son complot. Il se devait désormais de réussir, pour repayer sa dette envers lui.
Les soldats les emmenèrent en silence à travers les bois. Leurs lanternes dansaient dans la pénombre blême et laiteuse…
Jadea était nerveuse. Cette assemblée la mettait mal à l’aise. Elle lorgna du côté de son père. Dukatis la gratifia d’un regard entendu, qui lui demandait de faire preuve de patience. Malgré son affection pour Rhozena, cette convocation la laissait fébrile. Que faisaient-ils ici ? La Maison Clayne avait toujours été loyale envers Ascandia. Désormais, elle siégeait parmi les conspirateurs. Comment en était-elle arrivée si bas ?
Sa haine envers Orcan était encore vive, mais excusait-elle cette compromission ? Le Régent avait bafoué toutes les traditions d’Ascandia. Il avait proclamé l’érection de Duchés en lieu et place des anciennes Provinces, fractionnant le Royaume. Il avait anobli des serfs dans le but de se garantir un entourage loyal. Il avait fondé l’Hégémonie, en privilégiant les Maisons Angelus et Comnerius…
La loyauté de sa famille allait avant tout à Ascandia. Puis aux Niceus. Et aucune héritière n’avait encore été désignée. Si Rhozeia était déclarée reine, ils seraient des traîtres… Pouvaient-ils prendre ce risque ? Jadea Clayne regarda Rhozena. Elle lui faisait confiance, bien sûr, mais elle ne pouvait réprimer ses doutes…
Glavius Tantalig tapota nerveusement le montant de son siège. « Peut-on seulement lui faire confiance ? Il n’était qu’un enfant, la dernière fois que nous l’avons vu. Désormais, on parle de lui comme de l’enfant prodigue. Mais nous ne savons rien de lui… »
Corvus vit Malissandre murmurer quelque chose à l’oreille de Gombertus Ponce. Elle dissimulait ses lèvres du revers de sa main, et il ne put distinguer ses mots. Ponce acquiesça. Puis elle se redressa, un sourire au coin des lèvres. « N’ayez crainte, Seigneur-Palatin, ces longues années d’absence n’ont pas été passées dans l’inaction. Le jeune Narsès a été formé dans ce but précis. »
En réalité, Corvus n’en avait que faire de ces querelles entre nobles. Ce qui lui importait, toutefois, était le monopole et le blocus qu’exerçait l’Hégémonie sur tous les biens technologiques qui arrivaient sur l’Île de l’Empereur. Comment pouvait-il espérer prospérer de la sorte ? Il profitait bien entendu des recettes du marché noir, mais la situation devenait de plus en plus dangereuse. Agir était la meilleure solution, avant que le vent ne finisse par tourner.
Mais il savait aussi que la Baronne Malice avait fait de ce conflit une affaire personnelle. L’annexion du Cibré, la plus riche des régions de sa baronnie, au profit des Angelus lui était restée en travers de la gorge. Et même si elle n’était pas encline à l’admettre, elle comptait bien venger le meurtre de son frère…
Lucati Merrywood prit la parole. Il jouait avec sa barbe, de ses doigts couverts de bagues d’or et d’améthyste. « Constantine Narsès est avant tout un symbole. Un nom. Le vestige d’une époque que beaucoup considèrent désormais bénie. Un âge d’or. Le peuple le soutiendra. Et il appartiendra à nous de nous faire entendre, de dicter nos exigences… »
Darius Karn essuya ses lunettes. Il vit le contrebandier, Corvus, le regarder avec attention. Mais il haussa les épaules avec désinvolture. Il savait que cette réunion importait beaucoup pour son maître. La Maison Merrywood avait des frontières directes avec Ascandia. Et on murmurait à la cour que Baras Gurst, noble sans terre, cherchait à se voir confier la charge d’un Duché. Celui de Kestyr était logiquement le plus convoité, par sa proximité. Merrywood devait agir pour contrer les velléités expansionnistes de l’Hégémonie.
Dukatis Clayne prit la parole avec une certaine animosité. « Quelle preuve avons-nous qu’une fois au pouvoir, il ne sera pas pire qu’Orcan ? Quelle assurance avons-nous d’être écoutés une fois le trône en sa possession ? »
Les voix s’élevèrent, les commentaires fusèrent…
Rhozena Niceus prit la parole. Toutes les voix se turent. « Constantine Narsès a toute ma confiance. Il est l’homme que nous attendions. Vous le savez sans doute, Evalia et Beltamyr nous apporteront leur soutien si nous réussissons, et les Maisons Rabast et Saltigar nous ont donné leur bénédiction. Sans lui, rien de cela n’aurait été possible. »
Marcus Stryg se cala fébrilement dans son fauteuil. Il percevait la nervosité de son lige, Glavius Tantalig. Lui seul pouvait décider de leur implication ou non. Mais pour ce qui était de sa personne, le choix avait déjà été fait depuis longtemps.
Orcan avait dissous l’Académie Militaire. Cette ancienne institution formait tous les nobles aux arts de la guerre depuis des générations et des générations. Et le Régent l’avait tout simplement fermée. Il la considérait comme un lieu de discorde, et accusait ses professeurs et ses érudits de propager des idées contestataires…
Pire que tout, Orcan avait retiré au Seigneur-Palatin de la Maison Tantalig le titre de Seigneur-Protecteur dont sa famille était honorée depuis sept générations, pour le donner à l’un de ses sbires, Baras Gurst, anciennement un vassal des Niceus… Qui plus est, les Tantalig avaient souffert de la trahison d’Adris Fern, un ancien vassal désormais aux ordres d’Orcan. Une dernière goutte qui avait fait déborder le vase. Car si Fern entrait dans les bonnes grâces du Régent, il était possible que le transfuge hérite par décret du Duché de Lyras, et que les Tantalig soient relégués à une place de Maison Mineure…
Marcus savait qu’avec la permission de son lige, il mettrait sa lame au service de l’opposant. Il le souhaitait de toute son âme, si jeune soit elle.
Les portes de la salle de réception s’ouvrirent devant lui. Un héraut le précéda pour annoncer sa venue. Constantine Narsès fit taire ses appréhensions. Il s’apprêtait à entrer dans la gueule du loup. A faire face aux critiques, au scepticisme… Il se devait de les convaincre.
Son nom fut annoncé, et les discussions cessèrent. Il attendit un instant encore, puis pénétra dans la salle. Les gardes l’avaient amené à un petit pavillon de chasse bien gardé. Il avait vu des soldats aux bannières frappées des sceaux de la Maison Falatrish, Merrywood, Tantalig et Niceus, ainsi que certains blasons de maisons vassales. Tous les yeux s’étaient rivés sur lui à son passage.
C’était le moment crucial. L’instant fatidique…
Rigorus lui lança un regard confiant. Il soupira. Ils allaient bientôt savoir si la propagande qu’ils avaient lancée par le biais de Rhozena avait porté ses fruits. Il s’avança.
Tous les regards étaient braqués sur lui. Certains alertes et enthousiastes, d’autres méfiants, défiants, même. Convaincre. Il les reconnut, bien sûr. Il sentit un certain soulagement. Ceux qui devaient être là étaient présents. Glavius Tantalig, Malissandre Falatrish, Lucati Merrywood, Dukatis Clayne… Ils étaient venus en personne. Ils l’avaient pris au sérieux. Puis ses yeux trouvèrent ceux de Rhozena. Ses longs cheveux noirs comme l’encre luisaient sous les lueurs de l’âtre. Son teint délicat de porcelaine, ses yeux sombres comme des puits sans fond où il était facile de se perdre… Il se souvint de la frêle jeune fille de son enfance. Leurs jeux puérils et si innocents. Mais elle n’était plus l’enfant qu’il avait connue. Combien de fois avait-il tenté de se l’imaginer, en lisant ses lettres ? Alors qu’elle se tenait enfin devant lui, il ne put que constater son égarement et sa candeur. Son imagination n’avait su faire honneur à sa beauté. Elle était désormais une femme. Une reine.
Il s’inclina respectueusement.
Puis Constantine se redressa, digne, fier, et toisa son assistance. Convaincre. Son plan était irréprochable, étant données les circonstances… Il aurait certes aimé avoir quelques mois supplémentaires, mais le temps était désormais compté. Orcan avait annoncé son mariage en premières noces avec Rhozeia. Ce qui ne pouvait dire qu’une chose : il avait eu l’assurance de la part de l’Administratum que c’était elle qui allait être nommée héritière. Ils se devaient d’agir vite. Il laissa le silence s’installer avant de parler.
« Je vous remercie tous d’avoir accepté notre invitation. Je sais quels risques vous avez pris en venant ici. N’ayez crainte, ces risques seront mille fois récompensés. »
La mine de Dukatis se renfrogna. Glavius Tantalig cligna des yeux à plusieurs reprises. Ainsi, ce seraient eux, les plus difficiles à convaincre… Merrywood n’avait pas le choix. Falatrish était de son côté depuis le début. « Vous êtes venus ici pour une raison précise. Orcan doit être destitué. Si vous êtes ici, c’est parce que vous avez la certitude qu’il n’y a pas d’autre solution. Ascandia souffre sous son règne. Vous n’êtes nullement des conspirateurs, mais des libérateurs. »
Remna Ontoros grommela quelque chose. Dukatis le toisa avec insistance. « Nous sommes tous ici car nous savons que quelque chose doit être fait. Il appartient à nous de décider si ce que vous proposez est la bonne voie à suivre. Parlez ouvertement, et laissez-nous seuls juges. »
Ce Clayne était direct. Soit, qu’il en soit ainsi. « Je propose de frapper durant la cérémonie. »
Des murmures incrédules parcoururent l’assistance. Il les laissa grandir, les laissa glisser sur lui… Les laissa prendre racine dans leur cœur.
« Mon plan est simple. Nous avons intercepté un vaisseau marchand frappé des armoiries Strynn avec ses marchandises. Du vin de très bonne qualité, attendu pour la cérémonie. Nous avons des faux papiers et des autorisations de passage. C’est par ce biais que nous rallierons Olrankan et pénétrerons dans l’enceinte de la ville et ensuite du palais. Nous savons qu’Orcan a fait venir le Cardinal Sous-secteur pour bénir son union. Ce dernier est accompagné d’un cortège de centaines de prêtres venant de tout le Sous-secteur. Il nous sera facile de nous faire passer pour des prêtres du Ministorum. Ce qui nous donnera accès aux premières loges du mariage. Avec Orcan en directe ligne de visée. Vous n’avez pas à en savoir plus, mais ce plan est solide. »
Les nobles demeuraient silencieux.
Tantalig secoua la tête. « Ambitieux. Arrogant, même. Même si vous réussissez à assassiner Orcan. Que ce passera-t-il alors ? Vous serez faits comme des rats… »
Constantine sourit. « Je ne suis pas venu seul. En ce moment-même, vingt-mille soldats d’une milice privée sont en train d’atterrir non loin d’ici. Equipés de telle manière à ne permettre aucune résistance de la part des partisans d’Orcan. »
Glavius Tantalig hoqueta de surprise. « Des Hors-Monde, ici ? Vous le saviez, Lucati ? Pourquoi n’avez-vous rien dit ? » Dukatis grommela quelque chose. Mais Constantine savait ce qu’il avait en tête. Clayne avait été farouchement opposé à la venue des O’Dientro. Il était encore méfiant à l’égard de tous les Hors-Monde.
« Car je ne pouvais tolérer de discussion à ce sujet. Ils sont là, désormais. Aussi, utilisons-les. » A ces mots, Tantalig se tourna vers Constantine, véhément. Mais il demeura silencieux. « Sans eux, aucune victoire n’est possible. Grâce à eux, Olrankan sera nôtre en un rien de temps, avant que les Maisons Angelus et Comnerius ne puissent réagir. »
Même Dukatis dut acquiescer, malgré ses réticences.
« Nous nous sommes permis de solliciter les Maisons Rabast et Saltigar, qui comme vous le savez, avaient pris le parti de mon père, lors de la Grande Guerre. Ils se rallieront à nous, une fois Orcan mort. Il en va de même pour Evalia, et Beltamyr par la suite. Les Baliel, les Strynn, Abitan et Nunka, nous ont lancé des signes positifs. Si nous venions à vaincre, ils se rangeraient de notre côté. Comme vous le voyez, Orcan n’a que peu d’amis. Face à cette force de frappe, l’Hégémonie ne pourra rien faire. »
Merrywood, Tantalig et Niceus. Ces Maisons avaient combattu son père. Glavius Tantalig était à Khiel lorsque sa mère avait été souillée et tuée. Mais il devait avoir leur soutien…
« Ils seront alors assiégés. Et même l’Imperium devra se rallier à nous. » Constantine attendit un instant, avant de reprendre. « L’hésitation et l’inaction vous condamneront. Une fois Orcan lié à Rhozeia, sa nomination en temps que Reine d’Ascandia ne tardera pas. Et ne vous leurrez pas, Orcan sera alors promu Gouverneur planétaire. Il sera intouchable… C’est maintenant que nous devons agir, ou nous devrons nous taire à jamais. »
Talensha Fidr prit la parole, d’une voix douce et posée. « Vous proposez de déclencher une guerre civile. » Ce n’était pas une question. Mais Constantine devait de couper court à ce raisonnement. « Non, si nous sommes victorieux, le conflit n’aura pas le temps de dégénérer en guerre. »
Teridan Sheeve jeta un regard en direction de Dukatis Clayne. Peren Cassadar eut un sourire malicieux…
Malissandre interpella ses pairs. « Nous n’avons que peu de temps. Nous devons entendre votre décision sans plus tarder. Pour ma part… Corvus ? » Le contrebandier s’avança, d’un air enjoué et narquois.
Merrywood soupira. « Darius ». L’adepte s’avança à son tour, arrangeant les binocles sur le bout de son nez, sous l’œil vigilant de l’escroc de Malissandre.
Glavius Tantalig semblait perdu dans ses pensées. Mais il fit signe à Marcus. Ce dernier avança vers Constantine, et posa un genou à terre. « Ainsi que le souhaite mon maître, ma lame est désormais à votre service. »
Le temps sembla s’arrêter, tandis que tous attendaient la réponse des vassaux de Rhozena. Sheeve se retourna et s’éloigna, s’asseyant près de l’âtre. Palladius Antar posa une main sur l’épaule de Dukatis. Ce dernier regarda Rhozena, ferma les yeux… « Jadea »
Jadea sentit un énorme poids tomber sur ses épaules. Elle se tint un temps immobile, incrédule, et s’avança. Rhozena lui adressa un sourire, et ses lèvres murmurèrent un « merci » inaudible. « Si tel est le souhait de mon père… Cependant, qu’il soit dit haut et fort que je ne crois pas en cette entreprise. Constantine Narsès, j’espère que nous ne nous trompons pas sur ton compte. Que cela soit clair : je ne t’accompagne pas pour assouvir ta soif de vengeance, mais pour l’intérêt d’Ascandia. Peux-tu jurer que ton intérêt est le nôtre ? »
Constantine la dévisagea, rivant ses yeux dans les siens. « Je mentirais en disant que la vengeance n’est pas ce qui m’anime. J’exige réparation, et Orcan paiera pour ses crimes. Mais elle ne m’aveugle pas. Le bien d’Ascandia et la chute d’Orcan sont indissociables. »
Jadea fixa son père. Il semblait soudain vieux, usé. Cette vision la choqua. « Père ? » Dukatis soutint son regard… « Nous n’avons pas le choix, ma fille. »
« Qu’il en soit ainsi. Nous partons dans l’heure. »
Bien sûr, tous s’étaient préparés à cette éventualité. Corvus s’inclina en direction de Jadea Clayne. « Après vous, madame. » Les autres élus quittèrent la pièce. Rhozena quitta son dais, et passa près de Constantine. « M’accorderiez-vous un peu de votre temps ? » L’héritier des Narsès s’inclina. « Tout le temps que la prudence m’autorise… »
Palladius Antar accompagna Constantine et Rhozena jusqu’à une petit salle isolée. Malgré l’insistance d’Antar, Rhozena le congédia, lui demanda d’attendre dans le couloir. Les portes du boudoir se fermèrent derrière eux, les laissant seuls. Constantine la regarda en silence. Attendant qu’elle ne parle. Elle soupira.
« Laisse-moi parler sans m’interrompre, veux-tu ? » Constantine acquiesça, et pendant un moment ne subsista que le silence. Puis Rhozena parla, doucement. « Ton père a tué le mien. L’honneur me dicterait de le venger. Tout comme toi, mon âme brûle de le faire… Mais je renonce à mon droit et à mon honneur. Ce n’est pas la vengeance qui m’anime, mais le bien d’Ascandia. Sauras-tu mettre cela derrière toi, lorsque ton acte sera commis ? Sauras-tu te consacrer à ton royaume, lorsque ta vengeance sera accomplie ? Dans ton âme, y a-t-il quelque chose au-delà du meurtre ? Entrevois-tu seulement un avenir ? Si oui, je serai heureuse de me tenir à tes côtés. Et être ta reine. Nos familles, enfin réunies, pour laver les fautes de nos pères. Et je te promets mon amour inconditionnel en échange du respect de ta parole et de tes engagements. »
Constantine posa genou à terre. « A toutes ces questions, oui, ma reine. » Rhozena tendit la main pour venir effleurer la joue de Constantine, mais se ravisa au dernier moment. « Alors va, mon Prince. Mes prières t’accompagnent… »
jeudi 23 juillet 2009
DARK HERESY - A PATH OF VENGEANCE, RESUME, PART. 1
Acreage, Royaume d’Ascandia - Gullenforn, dans les Terres Merrywood. 804M41.
Le pavillon de chasse de la Maison Merrywood, à proximité du village de Gullenforn, est le théâtre d’une sombre assemblée. Plusieurs délégations nobles, venues de tout le royaume, ont répondu à cet appel. Tous, des conspirateurs. La tension est palpable. Tous arborent une expression grave, et les regards ne peuvent totalement dissimuler l’anxiété qui les habite. Les risques pris pour venir ici ont été formidables… Mais l’enjeu était trop grand pour être ignoré.
Lucati Merrywood, duc de Kestyr, est là, bien entendu. A ses côtés, Daste Vanenshil, le chef de la garde de sa maison, Adamus Rage, son maître d’armes, Sorosful Finch « Le Troubadour », réputé pour être son conseiller et maître espion. Darius Karn, un homme chétif et aux yeux fuyants, sera son émissaire dans la sombre entreprise qu’ils se préparent à perpétrer.
Malissandre Falatrish, baronne de Valentur, et son entourage sont aussi présents. Autour d’elle, son « Triumvira » : Gombertus Ponce, Peren Cassadar et Aurelius Dascaros. Tous excellent dans les méandres des intrigues et des jeux de cour obscurs et meurtriers. Corvus, un contrebandier et informateur habitué à naviguer en eaux troubles, sera son envoyé.
Glavius Tantalig, Seigneur-Protecteur d’Ascandia et duc de Lyras, est aussi présent, comptant dans sa délégation de prestigieux guerriers : Remna Ontoros, Umnor Kalentis et Talensha Fidr. L’élève de cette dernière, Marcus Stryg, fraîchement sorti de l’Académie militaire désormais moribonde, représentera la Maison Tantalig.
Aucun n’aurait fait le déplacement sans la présence de Rhozena Niceus, fille de feu Gordanus Niceus, ancien Haut-Roi d’Ascandia, et prétendante au trône. Son escorte est composée de Palladius Antar, « Le Chevalier Errant », Dukatis Clayne, « Le Lion d’Ascandia », et Teridan Sheeve. Le représentant qu’elle a choisi : Jadea Clayne, la fille de Dukatis, son amie d’enfance et sa confidente.
Tous ont de sombres griefs envers Orcan, actuel Régent d’Ascandia et d’Acreage. Tous attendent…
Acreage était un monde féodal d’où la technologie avait été bannie. Du moins en apparence, car les maisons nobles l’utilisaient sous couvert de pratiques magiques pour mieux asservir leurs serfs et leurs vassaux. De nombreux royaumes et empires coexistaient sur la planète. Thullé, Evaness, Avandyl, Avnar-mayyd… Mais l’un d’entre eux les dominait tous : Ascandia.
Ascandia était le lieu d’établissement des représentants de l’Imperium, et constituait le seul lien entre Acreage et le reste de l’humanité. Sur l’Ile de l’Empereur, située loin des côtes, à l’abri du regard des paysans et des masses ignorantes, les vaisseaux des Guildes Marchandes et des officiels de l’Administratum et de l’Ecclésiarchie se posaient pour commercer, collecter la dîme ou évangéliser la planète… Cette zone franche d’échanges et de négoce était la clé du prestige et de la fortune du royaume.
Il y a trente et une année de cela, en 773M41, Acreage avait été secouée par l’un des bouleversements majeurs de son histoire. Une flotte Void Born se translata dans son système, et leur demanda asile et hospitalité. Cette famille, qui vivait dans le vide et l’obscurité de l’espace, se faisait appeler les O’Dientro.
Gordanus Niceus, Haut-Roi d’Ascandia et Gouverneur planétaire d’Acreage, chargea son conseiller et ami de toujours, Belisarius Narsès, de négocier avec les étrangers. Ils avaient combattu ensemble lors de nombreuses guerres et d’innombrables batailles, et leur confiance mutuelle était infaillible. Du moins le pensait-on, à l’époque…
Après des mois de discussions et de tractations, un accord fut trouvé. Acreage deviendrait le point d’ancrage des O’Dientro, en échange de la livraison de nouvelles technologies et de machines sanctifiées. Belisarius Narsès se lia vite d’amitié avec le Commandant de la flotte, Harald O’Dientro, malgré leurs coutumes si différentes. Ou peut-être à cause d’elles…
Cette décision eut un accueil mitigé. De nombreux nobles étaient outrés. Acreage était un monde féodal. Seuls les nobles connaissaient la technologie et en faisaient usage, et étaient au courant de l’existence d’autres civilisations au sein des étoiles. La population de basse extraction en était totalement ignorante, et elle devait le rester. Beaucoup, en effet, ne craignaient que l’arrivée de cette nouvelle maison aux mœurs si étranges et à l’apparence si déroutante n’attise les rumeurs et les spéculations. Faire parader des Hors-Monde sur la planète pourrait contribuer à tirer les serfs de l’obscurantisme où ils étaient plongés de manière délibérée…
C’était néanmoins la raison officielle. Car les maisons avaient avant tout peur que leur venue ne change l’équilibre des forces du pouvoir, et par là même, leur fasse perdre du prestige.
Acreage a toujours été méfiante envers l’extérieur. Envers les étrangers, les intrus. Mais cette crainte devint peu à peu une haine silencieuse, en voyant les O’Dientro se rapprocher des hautes sphères du pouvoir avec aisance et désinvolture. Ils devenaient rapidement indispensables, grâce à leurs « présents ». Trop, au goût des maisons nobles qui considéraient désormais la famille Void Born comme leur rivale à abattre.
En 779M41, Gordanus Niceus, alors âgé de quarante-huit années, eut de sa femme Valeriana deux filles jumelles, Rhozena et Rhozeia. Valeriana ne survécut pas. Dans l’optique de lier leurs Maisons par le sang, Gordanus offrit l’une de ses filles en mariage à Belisarius. Mais celui-ci refusa, à la grande tristesse du Haut-Roi. Il était déjà en pourparlers avec Harald O’Dientro pour épouser sa fille aînée, Eynara, dont il était tendrement épris.
Beaucoup murmurent que c’est à ce moment précis que le destin d’Ascandia se joua…
Belisarius et Eynara se marièrent un soir de fin d’été. Et deux années plus tard, en 781M41, naissaient deux jumeaux, Constantine et Sophia Narsès. Bel et Gordanus s’accordèrent pour promettre Constantine à Rhozena. L’avenir semblait radieux, alors…
C’est alors que vint Orcan…
Agé de douze années, ce fils de paysan devint contre toute attente l’Ecuyer de Gordanus, un poste fort envié, car nul n’est plus proche qu’un Ecuyer de son maître, mis à part sa femme. Et Gordanus était veuf. Si un Ecuyer ne pouvait brandir une quelconque autorité en son nom propre, nul ne pouvait ignorer son influence tacite dans les jeux de pouvoir, par sa proximité avec le Haut-Roi. Ainsi, l’Ecuyer est courtisé et flatté par de nombreux sycophantes, et les nobles en quête de bonnes grâces.
Orcan avait vécu de nombreuses années dans l’orphelinat de l’Archevêque Leonid Varinius. Ce dernier faisait preuve d’une affection particulière pour son enfant de chœur. Alors qu’il devait passer grand clerc, il fut appelé par Gordanus pour le servir, et il accepta volontiers.
Varinius ne bouda pas non plus son plaisir. Car il s’était fait un allié et un informateur de choix dans les cercles fermés de la Cour d’Ascandia.
Orcan apprit très vite à se débrouiller, à danser au rythme des jeux de cour. Il avait un pragmatisme inné, et de sombres ambitions. Et ces deux qualités lui ouvrirent de nombreuses portes.
Des nobles vinrent se plaindre à Gordanus des relations que Belisarius Narsès entretenait avec les O’Dientro. Mais ils ne trouvèrent que la colère du Haut-Roi, resté fidèle à leur amitié. Ils vinrent alors trouver Orcan, et ce dernier accepta de les aider.
Petit à petit, au fil des années, il fit naître en Gordanus de terribles doutes. De plus en plus tourmenté par les afflictions de l’âge, le Haut-Roi, las et faible, se laissa peu à peu convaincre. Et au gré des murmures du jeune page, les déceptions futiles d’autrefois se muèrent en rancœurs tenaces. Belisarius avait osé refuser la main de sa fille. Et comment pouvait-il prendre la défense de ces étrangers à ce point ? L’abandonnait-il ? Planifiait-il d’usurper le trône avec le soutien de ces intrus ?
Après des années de complaintes et de pressions incessantes de la part de la noblesse, Gordanus, accablé, céda. Etait-il lui-même seulement responsable ? Ascandia voulait que Belisarius paie. Il était de son rôle d’écouter son peuple. N’était-ce pas lui, le seul à blâmer ? Avait-il écouté ses réprimandes et ses recommandations ? Non, il n’en avait fait qu’à sa tête… Il aspirait à plus de gloire et de pouvoir, c’était désormais une certitude. Peut-être s’estimait-il plus important que lui ? Un Haut-Roi ne pouvait se laisser aller à ses sentiments. Déjà, dans les couloirs, on entendait qu’il était faible et couard… Trop tendre avec son protégé. Un protégé qui le tuerait s’il ne pensait que ses heures étaient comptées.
Il fallait que quelque chose soit fait. Ou sinon, il perdrait la confiance des nobles, et son pouvoir serait remis en cause… Il devait leur donner satisfaction.
Orcan souriait. Il avait fait appel à la raison fuyante du monarque, à ses émotions les plus profondément enfouies. Et ce vieux sénile avait fini par entendre…
En 786M41, un édit proclama Belisarius Narsès conspirateur et coupable de haute-trahison envers Ascandia. Le traité de coopération avec les O’Dientro fut annulé. Les armées se mirent en branle vers la Province de Khiel, afin de capturer le traître et le soumettre au châtiment de l’Empereur-Dieu.
Belisarius se contenta de défendre, ses terres, mais aussi son honneur ainsi bafoué. Il envoya dans un premier temps nombre d’émissaires pour clamer son innocence et demander une entrevue avec le Haut-Roi pour clarifier ce malentendu. Gordanus accepta. Mais conseillé par ses généraux, il fit de cette réunion un piège. Belisarius réussit cependant à s’enfuir, au prix du sacrifice de nombreux soldats. Dans l’impossibilité de regagner Khiel, désormais assiégée, il erra avec ses troupes, de lieu en lieu, ne s’arrêtant pas plus d’une journée. Pendant des mois, des années, il échappa ainsi à ses poursuivants. Mais le souvenir du piège qui lui avait été tendu, et la mort de ses hommes, lui laissa un goût amer dans la bouche, qui deviendrait bientôt de la colère.
Eynara, Constantine et Sophia étaient restés à Khiel. Ils avaient vu les armées du Haut-Roi approcher, myriades de voiles dressées se dévoilant entre les branches des arbres morts de la forêt noyée, à travers la brume des marécages. Les portes de la ville furent scellées, tandis que les légions encerclaient la forteresse. Ainsi débuta un long siège, qui dans son sillage amena famine, fléaux et souffrances…
Gyserus Narsès, le frère aîné de Belisarius, qui avait abdiqué en sa faveur, était venu réconforter Eynara. Pris au piège dans la cité, il gouverna en lieu et place de son frère, espérant que des vagues de contestation viendraient leur apporter du soutien. Malissandre Falatrish et son frère Samayn se déclarèrent alliés des Narsès, bravant le courroux du Haut-Roi. Bientôt, les Maisons Rabast, Saltigar et Evalia joignirent leurs voix. Belisarius Narsès ne pouvait être un traître !
Mais Belisarius, contre toute attente, leur demanda de ne pas agir, leur disant qu’il y avait sûrement un autre moyen d’arranger les choses… Sans recourir à la guerre, sans recourir aux armes. Mais cela devait bientôt changer.
Sous la direction de Robben Buhl, chef de la garde de Khiel, la ville tint bon, dans l’attente de jours meilleurs, et du retour de Belisarius. Et elle aurait pu tenir de nombreux autres jours, si elle n’avait été l’objet de la vilénie et de la traitrise.
Eynara était entourée de deux dames de compagnie. Ses amies, ses confidentes. C’est à elles qu’elle parlait de ses craintes vis-à-vis de Belisarius, de ses enfants, de sa solitude, de ses longues nuits sans sommeil. Il y avait Lisara, de la Maison Fabia, famille mineure vassale des Narsès, et Nella Angelus, née Comnerius…
Nella aimait beaucoup Eynara. Mais par faiblesse de caractère, peut-être, ou à cause de son sentiment d’être devenue une prisonnière et du regard plein de mépris des habitants de Khiel, elle désespérait de retourner chez elle, auprès de son mari Iactus et de ses enfants. Et elle avait raison. Gyserus ne pouvait raisonnablement la relâcher, même s’il la traitait avec tous les égards dus à son rang. Elle était un otage de poids…
Mais c’est cela qui causa la chute de Khiel, en 788M41.
Avec quelques-uns de ses hommes, elle fit en sorte d’ouvrir les portes de la ville, afin que les armées du Haut-Roi puissent y pénétrer et investir le château. Elle serait ainsi libre, enfin délivrée de cette maison qui était devenue une prison. Jamais elle n’aurait pensé que son acte causerait carnage, meurtre et barbarie.
Comme une lance à travers de la chair tendre, les troupes de Gordanus, meneés par Glavius Tantalig, Balian Angelus, le fils de Nella, Isak Comnerius et Baras Gurst, se répandirent dans la ville, commettant de terribles et innommables exactions. Pillages, viols, meurtres… Le sang coula à flots, tandis que les soldats encerclèrent la forteresse et firent voler les lourdes portes du palais en éclats.
Balian Angelus fut le premier à pénétrer la salle du trône. Eynara Narsès l’y attendait, afin de signer la reddition de Khiel. Mais encore ivre de sang et de combats, il ne l’écouta pas. Aydan Kastemar, le maître d’armes de Belisarius, sentit le danger. Il s’interposa, et blessa Balian. Il combattit une dizaine de soldats, exhortant à Eynara de s’enfuir et de mettre les enfants à l’abri, avant de sombrer, transpercé par de nombreuses lances. Sous les yeux d’Eynara, Balian tua la nourrice de ses deux enfants, Mona. Faydar O’Dientro réussit à emmener Sophia par la porte située à l’arrière du dais. Mais Constantine n’eut pas cette chance. Balian ordonna à ses hommes de s’emparer de lui. Et devant ses yeux, il viola sa mère avant de l’égorger.
On amena dans la salle du trône d’autres captifs. Gyserus, Fortunata, la sœur cadette de Belisarius, Robben Buhl, Feldren Spiel, l’intendant, Emagaël Gluck, l’apothicaire, le garde-chasse rengel Fritz, Lisara, Rigorus Tilt, le précepteur des deux enfants… Fortunata connut le même sort qu’Eynara, livrée aux soldats de Balian, sous les hurlements de rage de Gyserus et de Tilt. Gyserus fut exécuté. Lisara fut emmenée par les soldats. Même si elle survécut, son sort n’est pas enviable. Pendant des jours, elle endura sévices et humiliations, avant que Glavius Tantalig ne puisse reprendre le contrôle de son armée.
Aux autres captifs, on offrit un choix. Renier Belisarius et se ranger de leur côté, ou périr. Tous acceptèrent sous la contrainte. Mais Rigorus Tilt jura de venger un jour la mort de sa bien-aimée, Fortunata, qu’il affectionnait secrètement, et que jamais il n’aurait osé déshonorer par des aveux inadéquats. Il n’était que précepteur, elle une noble de haut rang…
Le Confesseur Sattaran avait réussi à faire épargner les derniers survivants. Son autorité, issue du Ministorum, le rendait intouchable, et ses paroles pouvaient faire office de loi, si elles n’étaient pas contredites par l’Archevêque Varinius. Qui oserait s’en prendre à un serviteur de l’Empereur-Dieu ? Ainsi, les tueries et les massacres cessèrent…
Belisarius eut finalement vent de la chute de Khiel et du sort de ses proches. Pendant des jours, ses hommes craignirent qu’il ne perde goût à la vie. Il s’était muré dans un profond silence, refusant de voir quiconque. Et seuls ses gardes pouvaient de temps en temps entendre ses sanglots et ses cris de rage. Quand il sortit de sa tente, cependant, son visage arborait une expression de pure haine, et il ne pensait plus qu’à la vengeance.
Il réunit sous sa bannière les Maisons Falatrish, Rabast, Saltigar, Evalia ainsi que de nombreuses familles vassales. Ses armées, fortes de trente mille hommes, déferlèrent sur Regalia, le siège du pouvoir, en éventrant la Province d’Engel, terre des Angelus. Le tiers des forces de Gordanus était encore en Khiel, et le Haut-Roi s’attendait à voir Belisarius se diriger vers ses terres plutôt que vers lui.
Les armées des Maisons Baliel, Strynn, Comnerius et Merrywood s’unirent pour s’opposer à cette force de frappe. A elles trois, elles réunissaient plus d’un tiers des armées d’Ascandia.
Mais cela n’était là qu’une diversion. Une flotte massive apparut un matin aux abords de la capitale. Les cloches sonnèrent l’alarme, mais tous attendaient une frappe terrestre. Le temps que les défenses s’organisent, les vaisseaux effilés de la Maison Falatrish déposèrent des centaines d’hommes au sein du port.
Même avec la surprise de leur côté, la lutte fut âpre dans les rues de Regalia. Ruelle après ruelle, artère après artère, les troupes de Belisarius tracèrent leur chemin jusqu’au palais royal. Gordanus, choqué par la vue de sa ville ainsi prise d’assaut, furieux de voir son port détruit et en proie aux flammes, demanda à ce qu’on prépare son armure. Mais Orcan demeurait introuvable. Un autre page l’habilla et harnacha sa monture.
Il ouvrit les portes du palais, et sa garde chargea face aux assaillants. Bientôt, les deux anciens frères d’armes, désormais ennemis, se firent face. Au sein des clameurs, Gordanus interpella son adversaire : « Que l’Empereur-Dieu m’écoute ! Je ne te laisserai pas détruire Ascandia, je ne te laisserai pas souiller sa capitale du sang de ses hommes et du martellement du métal ! Viens prestement, et réglons cela d’homme à homme, de frère à frère ! ».
Les bruits de la bataille se tarirent petit à petit, au fur et à mesure que Gordanus récitait et répétait sa litanie. Belisarius l’entendit, lui aussi. Bientôt, les deux armées se firent face, en silence, sur la place principale de la ville.
Bravant les fumées âcres des barricades enflammées, les deux adversaires s’avancèrent. Belisarius, Horizon, la lame forgée pour lui par les O’Dientro à la main. Gordanus, en armure étincelante, soulevant haut son épée bâtarde…
Dans un silence presque total, ils s’affrontèrent. Tous retinrent leur souffle. Les lames tonnèrent et tintèrent l’une contre l’autre. Mais Belisarius prit l’ascendant sur son ancien lige. A chacun de ses coups, même s’il ne semblait pas touché, l’armure de Gordanus claquait et se gondolait, comme frappée d’un grand coup de masse. Soudain, l’épée de Belisarius transperça le plastron du Haut-Roi. Ce dernier posa son genou à terre, lâchant son arme, qui cliqueta contre le sol pavé. Du sang goutta le long de celle de Belisarius. Le Haut-Roi semblait surpris.
Avant de sombrer, Gordanus bougea les lèvres, mais seul Belisarius aurait pu l’entendre. Le Seigneur de la Maison Narsès hurla de rage, de tristesse, face à tout ce qui aurait pu être et qui ne serait jamais, à tout ce qui a été et jamais plus ne pourrait être changé… Et autour de lui, les soldats des deux camps se prosternèrent. Car c’était un duel que Belisarius avait gagné. Et par les lois anciennes, il était désormais Haut-Roi d’Ascandia.
Mais c’était loin d’être la fin des tourments.
Orcan entra dans la capitale, chevauchant sous la bannière de l’Empereur-Dieu. Il était accompagné de dignitaires de l’Administratum et de l’Ecclésiarchie, ainsi que d’une petite armée frappée aux couleurs de la Maison Fern, famille mineure vassale des Tantalig. Les soldats s’écartèrent à son passage, se prosternant devant la bannière brandie. Il s’arrêta devant Belisarius, et sortit de sa poche un parchemin scellé. Il lut, à haute voix, pour que tous puissent entendre :
« Belisarius Narsès est déclaré traître à l’Imperium. Son châtiment sera la mort, et la sentence devra être prestement exécutée. »
Deux soldats d’Orcan, ou plutôt des bourreaux, s’avancèrent vers le nouveau Haut-Roi. Le parchemin portait le sceau de l’Archevêque et de l’Administratum. Nul ne pouvait se dresser contre cette décision. Mais c’est ce que fit Samayn Falatrish, le frère de Malissandre. Il tua le premier bourreau prestement, et se débarrassa sans mal du second. Mais c’est alors que le coup de laser retentit… Les soldats regardèrent le corps de Samayn s’affaisser, un trou béant dans la poitrine, puis ils fixèrent attentivement le tireur, Adris Fern, qui se tenait aux côtés d’Orcan.
Quelle était cette magie ? La peur se lut dans tous les regards… Seuls les nobles savaient. Mais les serfs et les ignorants furent pétrifiés d’effroi. Orcan parla distinctement : « Ceci est la puissance de l’Empereur-Dieu, et je suis son élu. Il m’a nommé Régent de ce royaume, pour le laver du péché des nobles, car il ne tolère plus leurs actes barbares et sanglants ! ».
Son regard se tourna vers Belisarius, et son sourire était carnassier. Mais le Seigneur Narsès avait déjà fait le deuil de sa vie, et c’est non sans soulagement qu’il accepta son sort. Deux nouveaux soldats avancèrent, enjambant le corps de Samayn. Dans une parodie d’exécution, ils tuèrent Belisarius, devant des multitudes de regards horrifiés. Ses dernières paroles furent pour Eynara, qu’il n’allait pas tarder à rejoindre…
Depuis sa salle de commandement, Harald O’Dientro jeta un dernier regard à la planète, aux espoirs brisés, aux amis perdus, avant que son vaisseau ne disparaisse à jamais dans l’obscurité du ciel, emmenant Sophia avec lui…
C’est ainsi qu’en 789M41, Orcan devint Régent d’Ascandia et Gouverneur par interim d’Acreage, dans l’attente de la nomination d’un successeur, soit en la personne de Rhozena, soit en celle de Rhozeia, toutes deux filles de Gordanus Niceus.
On pourra s’étonner qu’avec son jeune âge, il ait été promu à un si haut poste, mais c’est sans compter que sur Acreage, une personne est déjà un homme à cet âge. On pourra aussi s’étonner de la sénilité de Gordanus, âgé à peine de six décades, si ce n’est que sur cette planète, six décades est un âge déjà vénérable…
Sous la protection de l’Imperium, Orcan commença à gouverner. Il fit taire les contestations, annexa le Cibré, une région autrefois sous l’autorité des Falatrish, pour la donner aux Angelus. Il fit proclamer un édit : nul ne devait plus jamais prononcer le nom des Narsès, ni fouler leurs terres, sous peine de mort. Les populations de Khiel durent s’exiler. Un exode de milliers et de milliers d’âmes.
Rigorus Tilt s’exila à la cour de la baronne Falatrish, une vengeance terrible ancré dans son cœur. Mais de nombreux autres, comme Robben Buhl, choisirent de servir Orcan.
Pour contenter les nobles, Orcan réorganisa le royaume. Les territoires, autrefois des Provinces, devinrent des Duchés, avec plus d’autonomie allouée aux Maisons. Cependant, les dîmes impériales furent augmentées drastiquement, et de nombreux nobles, s’ils ne pouvaient clamer leur outrage, se mirent à maugréer secrètement…
Orcan ne pouvait laisser vivre Constantine, dernier survivant des Narsès. Le temps ferait de lui un ennemi dangereux, il ne le savait que trop bien. Mais c’était sans compter sur la bienveillance du Confesseur Sattaran. Ce dernier persuada l’archevêque de le laisser en vie et de l’exiler loin de cette planète. Varinius, malgré toute sa corruption, ne pouvait s’abaisser à autoriser l’exécution d’un enfant. Et malgré les protestations d’Orcan, Constantine fut emmené vers un monastère, hors du système, et le Régent ne put qu’espérer qu’il ne reviendrait plus jamais.
La rampe du vaisseau s’abaisse, pour révéler une silhouette encapuchonnée. La pluie s’abat, drue, sur Acreage. L’homme inspire l’air vicié et chargé de souvenirs. A ses côtés, des mercenaires en combinaison de combat. Des Hors-Monde. L’homme scrute les environs. Quelqu’un l’attend non loin, brandissant une lanterne. A côté de lui, une petite embarcation aux voiles repliées, et des bateleurs au regard inquiet. Il le reconnaît. Son ancien précepteur, Rigorus Tilt.
Constantine Narsès pose le pied sur sa planète, après quinze années d’exil. Il foule du pied la terre qui l’a vu naître et qui lui revient de droit. Il revient, pour la reconquérir, mais avant tout pour se venger de celui qui lui a tout pris. Celui qui lui a dérobé sa vie…
lundi 20 juillet 2009
DARK HERESY - MAGGOTS IN THE MEAT / FIN
Mardi 21 juillet aura lieu la dernière séance du scénario Maggots in the Meat. une partie de la session suivante (août) sera utilisée pour son épilogue.
Joueurs présents : Thomas, Fabrice, Bastien, Cyril
Guest star : Kai
Joueurs présents : Thomas, Fabrice, Bastien, Cyril
Guest star : Kai
mercredi 15 juillet 2009
DARK HERESY - MAGGOTS IN THE MEAT
Les samedi 4 et dimanche 5 juillet derniers s'est tenu le marathon Dark Heresy.
Joueurs présents : Fabrice, Thomas, Matthieu, Cyril
Guest Star : Kai
Prochaine partie prévue mardi 21 juillet à 20h pour la fin du scénario !
Joueurs présents : Fabrice, Thomas, Matthieu, Cyril
Guest Star : Kai
Prochaine partie prévue mardi 21 juillet à 20h pour la fin du scénario !
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