jeudi 3 décembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.8



- Viens à moi, mon enfant. N’aie pas peur. Je ne te veux aucun mal.

Constantine cligna des yeux, et il sentit la soudaine et violente pulsion d’aller le retrouver. Mais la sensation reflua petit à petit, remplacée par une vague de sueurs froides... Le visage disgracieux de Coriolanus Vestra se durcit, vraisemblablement contrarié. Il retira son épée noire du sol et descendit les quelques marches de l’estrade.

- Viens à moi. Joins-toi à moi, et tu recevras ton véritable héritage. Le sang du Héraut coule dans tes veines…

Le pachyderme vint lentement à leur rencontre, tendant vers eux une main ornée de lourdes bagues dorées. Seuls étaient perceptibles les sons ténus de ses pas effleurant le sol, dans un doux froissement de robes. Les acolytes encadrèrent Constantine. Venria s’avança brusquement, braquant son fusil à pompe sur le mastodonte. Strygos la ramena à la raison.

- Il nous le faut vivant !

La Sororitas étouffa un juron, et tressaillit lorsque la pointe de l’épée tronçonneuse heurta le sol. Le prêcheur continua d’avancer, les dents acérées de sa lame raclant sur les dalles, dans un crissement suraigu. Il souriait toujours. Une grimace avide et vicieuse…

- Qu’il aille se faire foutre !

Plex s’avança et tira sans semonce sur l’hérétique. La balle toucha le faux prêtre à l’épaule, projetant une fine bruine de sang, mais Vestra ne sembla nullement affecté. Il se tourna vers le gêneur tandis que ses yeux s’illuminaient d’une lueur verte.

- Meurs !

Une décharge biomantique fouetta l’air devant lui, projetant des tentacules glauques de plasma vers Plex et menaçant de le vitrifier. Mais les appendices éclatèrent avant de le toucher, comme balayés par une force invisible. Vestra gronda en se tournant vers la silhouette voûtée et encapuchonnée qui s’avançait parmi les acolytes. Ragaana recula d’un pas en sentant l’aura de Boucles d’Or lui donner des nausées…

Les yeux de Vestra s’écarquillèrent soudain. Un grondement guttural résonna dans sa gorge.

- Vous avez osé amener une intouchable ?

Avec une rapidité étonnante vu sa corpulence, il enclencha et leva son épée tronçonneuse. La lame rugit, vrombissant comme si les portes de l’enfer s’étaient soudain ouvertes. Venria dégaina sa lame et vint parer les dents grondantes, mais son épée fut presque emportée sous la violence du choc. Elle tituba, désarçonnée par l’impact, et chercha à bloquer une nouvelle attaque avec son épée fissurée. Mais Coriolanus avait déjà soulevé sa lame, et l’abattit de nouveau vers la techno-adepte.

Ragaana recula, impuissant en présence de Boucles d’Or. Plex, Dakka et Constantine tirèrent sur le prophète, qui esquiva certains tirs et en encaissa d’autres. Zek vit la servante de l’Omnissiah esquiver l’attaque, mais remarqua aussi la vitesse phénoménale avec laquelle les plaies de Coriolanus Vestra se refermaient une fois hors du rayon d’action de l’intouchable.

Graham Strygos et Urdos Garm vinrent presser Vestra pour le conserver à la lisière de l’influence de la paria. Hurlant de fureur, le prêtre renégat asséna des coups rageurs dans leur direction. Les dents raclèrent l’armure et la chair du prêtre du Macchabeus, l’envoyant bouler contre le mur. Dans sa chute, il heurta un brasero, qui enflamma un épais rideau.

Dans la lueur grimpante des flammes, Vestra porta un nouveau coup, que la techno-adepte ne parvint pas à éviter. L’épée vrilla en déchirant sa tunique et crissa contre du métal. Elle s’effondra dans un suintement de liquides huileux. Alors que la main du traître cherchait à agripper Constantine, Zek enfonça l’une de ses lames dans le coude de l’hérétique. Strygos frappa les tendons de sa cheville et parvint à les sectionner. Venria plongea sa lame dans son épaule, lui faisant lâcher son épée, qui claqua sur le sol et continua de s’agiter quelques secondes avant de s’éteindre. Quint enfonça un couteau dans son dos.

A genoux, Vestra hurla de douleur. Encore dans le rayon d’action de l’aura de Boucles d’Or, qui se redressait péniblement sur son coude tout en retenant l’épanchement de ses boyaux mécaniques, ses blessures ne parvinrent pas à se refermer. Son regard devint hagard, alors que de la bave coula de sa lèvre inférieure. Sa tête dodelina lentement en avant, et il s’affaissa sans pour autant tomber au sol, recroquevillé mais retenu à genoux à cause des replis de sa graisse.

Ragaana tenta de contenir la nausée. Mais son corps était encore affaibli par les contrecoups du Warp qu’il avait subis. Il se souvenait de sa période de coma, de ses délires enfiévrés…

Il était à genoux, et contemplait le globe luminescent d’une planète depuis la baie vitrée. Son regard survola sa surface, et parcourut, sous les spirales de ses nuages, les étendues sauvages de ses déserts, ses savanes, ses chaînes de montagne colossales et ses vallées monumentales… Seules les zones septentrionales et méridionales extrêmes laissaient entrevoir des forêts sombres. Orbitant autour de la planète, une lune ténébreuse dérivait lentement… La seule partie illuminée du satellite, un mince croissant dessiné comme une griffe, révélait l’atmosphère viciée de ses marécages bruns et jaunâtres. Tout autour du vaisseau, une flotte titanesque patientait, comme figée dans le vide de l’espace.

Une présence se tenait à ses côtés. Une silhouette massive, impériale. Le Primarque contemplait lui aussi le satellite décrire son arc gracieux, à travers les vitres blindées et polarisées.

- Davin.

Horus se tourna vers lui, majestueux, glorieux, auguste... Il portait un ensemble de robes lacées par des cordelettes d’or blanc et de cuivre, sur une armure faite de plaques de couleur vert émeraude. Sur son plastron, la pupille fendue de l’œil du Maître de Guerre luisait dans la pénombre.

- Mes derniers souvenirs et mes derniers jours de gloire, avant que mon nom ne soit entaché à jamais par l’infamie…

Les yeux du Primarque se reposèrent à nouveau sur la sombre lune, dont la faucille éclairée s’étiolait lentement, alors qu’un voile de tristesse et de regret passait sur son visage.

- Nous n’étions pas préparés.

Il lui raconta sa lutte contre les armées de morts pestiférés, son duel éprouvant face à son vieil ami Eugen Temba, la douleur que lui avait causé la blessure faite par l’Anathame. La fièvre, les délires… Sa confrontation face aux puissances du Chaos.

- Sa peste avait gangrené ma chair, et cherchait à souiller mon âme. Mais comment aurions-nous pu savoir ? Nous étions totalement ignorants. Leurs visions fissurèrent mes certitudes, et par les brèches créées par mes doutes, ils réussirent à m’atteindre et à se déverser en moi…
- Tu veux quoi, traître ? Le pardon ?
- Non. Je ne cherche nulle clémence. Seulement à expier ma faute, et à réparer mes erreurs. Des nuages sombres s’amassent à l’horizon. La dernière bataille pour l’âme de l’Empereur. Et je compte bien jouer mon rôle, tel qu’il me l’a ordonné.

Soudain, Ragaana entendit un grand fracas faire trembler la porte de la salle d’observation. Il sursauta, se tournant vers le bruit.

- Il est là. Il cherche à nouveau à nous corrompre.
- Qui ?
- Celui que tu as courroucé. Tu as murmuré son nom à l’Anathame, et ouvert une porte par laquelle il peut désormais entrer. Je parviens à le garder au-dehors, mais tôt ou tard, il finira par percer ma volonté…

Ragaana riva ses yeux sur la porte, alors qu’elle était agitée d’une nouvelle secousse.

- Mais ce n’est pas lui que tu dois craindre pour le moment. Il est là, à vous observer. Il vous a suivi, à la lisière entre notre monde et le leur. Et vous allez l’amener droit vers…

Les paroles d’Horus furent noyées dans le silence. Ragaana tourna son regard vers Davin, comme si ses yeux étaient attirés par un aimant. La lune obscure était désormais au centre de la planète, entièrement noire. Un œil, fixé sur lui, terrible et inflexible… Les images perfides de l’Astre Tyran lui revinrent en tête, alors qu’il trônait dans le ciel de Géhenne. Des larmes coulèrent sur ses joues…


Il se tenait parmi eux. Comme s’il avait toujours été là. Mais ils sentirent sa présence bien avant qu’ils ne le virent. Il était vêtu d’une lourde pelisse noire en haillons, dont les lambeaux s’agitaient comme des serpents sur un vent absent. Sous sa capuche, ses yeux étaient entièrement noirs, mais semblaient pourtant contenir toute la lumière des étoiles. Son visage grisé était entouré d’un col de fourrures noires. Sur la surface de son manteau, les acolytes virent tournoyer des silhouettes, des membres, des visages, des corps torturés et faméliques. Ou étaient-ce des plumes luisantes qui frétillaient, noires et lustrées comme celles d’un corbeau ? Ou bien des nœuds de couleuvres entortillées ?

Ses lèvres noires souriaient. Constantine sentit ses boyaux se liquéfier, il claqua des dents, ne pouvant empêcher ses membres de trembler. Dakka resta bouche-bée, incapable de bouger, incapable de respirer. La bave coulait de ses lèvres, et son esprit hurlait derrière ses yeux exorbités. Garm éclata d’un rire fou et malsain, tandis que des larmes coulaient de ses yeux. Quint tomba à genoux, les yeux perdus dans le vague, accablée par un désespoir morbide.

Strygos se lacéra les bras à plusieurs reprises en s’esclaffant, animé par une fureur démente. Ragaana sentit un liquide chaud couler le long de ses jambes tandis qu’il se griffait le visage… Zek cracha de la bile sur le sol couvert de givre. Seule Boucles d’Or se contenta de le dévisager avec animosité.

Toutes les flammes des braseros semblèrent soudain s’éteindre, comme si la présence absorbait la lumière alentour. Une nuit implacable sembla envahir la pièce.

Plex hurla de terreur et rampa jusqu’à un mur. Mais malgré la folie qui s’insinuait dans son cerveau, il le reconnut. Il prononça un nom.

- Calen.

L’homme se tourna vers lui, et sembla soudain songeur.

- Autrefois, peut-être…

Venria pria pour que l’Empereur-Dieu les prenne en pitié. Elle sentit une rage immense l’envahir, et parvint à chasser la terreur de son esprit. Elle hurla en brandissant son fusil, invoquant Sa furie en récitant des psaumes, et tira de nombreuses décharges sur l’intrus, à bout portant… Mais les éclats de shrapnel qui frappèrent le manteau de l’inconnu ne lui firent rien. La surface grouillante de la pelisse fut agitée de remous. C’était comme de lancer des gravats dans une mare profonde. Il continuait d’avancer comme si de rien n’était, insensible à ses tentatives de l’arrêter.

- Très Saint Empereur-Dieu, donnez-moi Votre force !

Elle fit appel à toute sa rage, et sentit une énergie sacrée emplir son être. Elle murmura des prières en levant son épée, et chargea la silhouette d’ombre pour l’abattre de son poing armé du feu divin. L’inconnu se tourna vers Venria. La lame pénétra jusqu’à la garde la surface de son manteau, qui fut agité de tremblements et de vaguelettes huileuses… Puis la lame explosa.

- Tu ne peux rien contre moi. L’Empereur-Dieu est de mon côté.

Le manteau s’anima soudain, et des tentacules d’ombre fouettèrent l’air. Les pseudopodes enlacèrent Venria, qui hurla de douleur en sentant comme des milliers d’aiguilles lui lacérer les bras, le torse et le visage. Le monde tournoya tout autour d’elle, alors qu’elle plongeait son regard horrifié dans celui de l’intrus. Elle y vit des astres, des galaxies… Les rouages complexes de l’univers.

Une bise mordante soufflait sur les montagnes enneigées, soulevant des brumes de poudreuse au-dessus des crêtes rocheuses. Un tunnel avait été creusé dans la roche noire et glacée, et descendait dans les entrailles de la terre. Une succession d’escaliers et de plateformes, que longeaient des séries de statues de saints désormais oubliés, et dont les visages avaient été effacés par le temps. Des cierges et des photophores étaient allumés un peu partout, et de la cire dégoulinait sur des piédestaux et les marches. Le souterrain était large, et le chemin élimé par des siècles de passage.

Elle regarda les figures usées, frissonnant de froid, mais aussi de peur. Une main burinée se posa sur son épaule, et elle leva les yeux. Son grand-père se pencha vers elle, la toisant de toute sa hauteur. Sa petite main vint chercher celle du vieil homme et la serra fort. Il était grand, et fort, et sa présence était réconfortante…

- Tu dois être forte, petite…

Elle hurla tandis que les seringues perçaient sa peau. Elle tenta de se débattre, mais elle était clouée sur la table d’opérations, agrippée par d’épais liens de cuir et de métal. L’homme aux yeux perçants était penché sur elle et lui caressait la tête, tandis qu’une structure métallique armée de dizaines de bras mécaniques terminés par des aiguillons ponctionnait sa chair en de multiples endroits. Au-dessus des méchadendrites, des cuves transparentes étaient emplies de liquide bleuté, mais au gré des piqûres, leur niveau baissait. Il entendit la voix de son grand-père.

- Atxet !

L’homme aux yeux perçants le toisa avec détermination.

- Elle va bien, Harald.
- Doit-elle souffrir de cette sorte ?
- Nul processus psychoactif ne se crée sans douleur… Elle vivra. Déjà, je sens les pigments du minerai se lier avec son potentiel psychique, et avec ceux de notre… hôte.
- Fallait-il que ce soit elle ?
- Notre sang est devenu faible. Si nous avions pris le garçon…

Elle pleurait, désormais. Pourquoi son grand-père lui infligeait-il tant de souffrance ? L’homme aux yeux perçants se tourna à nouveau vers elle. L’air autour de lui sembla vibrer et tournoyer, tandis que ses pupilles devenaient deux petits points noirs dans ses yeux autrement blancs.

- Tout va bien. Tout sera bientôt terminé.

- La fin est proche, Empereur.

Venria se trouvait dans une salle de trône colossale. En face d’elle se dressait un grand trône d’onyx, surmonté d’un gigantesque œil à la pupille fendue. Le globe était ceint par de grands disques d’or, et pulsait d’une lueur écarlate. Au-dessus du dais et des fresques dorées de scènes de bataille qui couvraient le mur, des bannières élimées d’un pourpre sanguin pendaient depuis des balconnets innombrables. Autour des marches noires de l’estrade, de nombreux corps gisaient dans des mares de sang. Des corps d’Astartes. Elle vit une tête tranchée à ses pieds, coiffée d’un casque arborant un long panache de plumes noires maculées d’hémoglobine. De nombreuses hallebardes énergétiques et lames tronçonneuses jonchaient le sol, certaines brisées, d’autres encore intactes.

D’autres corps, des Astartes eux aussi, étaient difformes et terrifiants, et leur visage était couturé. Les Marines du Chaos arboraient des armures noires et balafrées. Dans leurs mains, des armes ignobles et hérétiques. Des crânes et des visages dépecés étaient épinglés aux rivets de leurs épaulettes.

Elle discerna une silhouette imposante couchée parmi les cadavres… Elle était bien plus grande et massive que les Space Marines, revêtue d’une armure dorée. Une peau de léopard barbouillée de sang couvrait son épaule et une partie de son torse, tandis que deux gigantesques ailes d’aigle, qui lui servaient de cape, étaient étalées sous son corps brisé. Sur son plastron, un cœur embrasé serti d’ailes déployées faisait écho au sang qui couvrait son corps.

Son épée couleur de sang gisait brisée à son côté. Des mèches de ses longs cheveux châtain et trempés de sueur tombaient en travers de son visage, qui affichait une expression de détresse et de tristesse infinies. Un disque d’or auréolait sa tête inclinée, comme un astre aux flammèches dansantes…

Deux armes s’entrechoquèrent.

Alarmée, elle détourna la tête, et vit du coin de l’œil, à travers la baie vitrée, se dérouler une bataille cyclopéenne. Des myriades de vaisseaux bataillaient dans l’obscurité de l’espace. Des croiseurs, des frégates, des barges de bataille s’entremêlaient dans une lutte terrible. Des nefs bombardaient une planète sombre, et sillonnée de nuages jaunâtres et viciés. Ses continents-ruches étaient parcourus de déflagrations monstrueuses, son atmosphère embrasée sous un feu nucléaire…

Une lame énergétique fuma en traçant un arc complexe, ricochant sur un gantelet griffu. Un marteau tournoya avant de s’abattre sur le sol… C’était un duel de colosses.

L’un était paré d’une armure d’or flamboyante et étincelante. Sa cape d’un riche rouge virevolta alors qu’il esquivait une nouvelle frappe de son adversaire. Ses épaulettes étaient chacune ornées d’un aigle aux ailes déployées, et sur son plastron trônait l’Aquila bicéphale de l’Empereur-Dieu de l’Humanité. Son visage était surmonté d’une couronne de lauriers en or, et derrière sa tête, un rapace ambré veillait, inflexible et imperturbable. Il tenait dans sa main droite une épée enflammée, et son poing gauche était enchâssé dans un gantelet aux griffes acérées.

Venria tomba à genoux, alors que des larmes coulaient le long de ses joues.

Face à lui, un titan de métal noir le toisait de toute sa hauteur. Son armure ténébreuse aux lisérés d’or était incrustée de gemmes rouges en forme d’yeux malfaisants. Elle était couverte de crânes et de peaux humaines ensanglantées et pourrissantes. Ses épaules étaient couvertes de fourrures sombres. Son bras gauche brandissait un lourd marteau anthracite riveté d’or, tandis que sa main droite se terminait par de monstrueuses griffes annelées. Sa tête semblait emboîtée dans un cube de métal noir, reliée à son armure par de nombreux câbles cybernétiques. Une lueur infernale émanait de son gorgerin, illuminant son visage hideux d’un éclat démoniaque.

L’épée de feu trancha la tête du marteau, et frappa à nouveau. Le Maître de Guerre beugla soudain, et jeta son arme pour dégainer une épée ignoble. Il para le coup dans un panache d’étincelles.

Le duel continua pendant ce qui semblait être une éternité. La Sororitas pleurait, incapable de contrôler ses émotions alors qu’elle assistait au combat final de l’Empereur son Dieu. Puis elle vit, en étouffant un cri de désespoir, la lame d’Horus pénétrer profondément dans la poitrine du dieu vivant, et lui arracher une gerbe de sang. Elle hurla, supplia.

Il tomba à genoux, tandis que son ennemi levait une nouvelle fois son épée.

- Tu es faible, tout comme l’était ton cher protégé. Prépare-toi à mourir !

Soudain, elle entendit le bruit saccadé d’une rafale de détonations venant de derrière elle. Des bolts crépitèrent sur l’armure du traître, qui détourna le regard une fraction de seconde. Un Astartes s’était relevé, arborant de cruelles blessures, et avait tiré dans un dernier accès de furie. Horus hurla, et une vague d’énergie incandescente vitrifia le pauvre guerrier.

Mais c’était tout ce dont avait besoin le Maître de l’Imperium. Venria vit ses yeux s’illuminer d’un feu aveuglant et son armure se couvrir de givre, tandis qu’il se ruait sur Horus. Il était baigné d’une lueur divine, pure et ardente. Le Champion du Chaos hurla, de douleur cette fois, tandis qu’il posait un genou à terre. Ses traits se déformèrent et reprirent de la couleur. Ses yeux noirs se vidèrent de leur obscurité, et un homme, et non plus un démon, fit face à l’Empereur.

Horus cligna des yeux, dans l’incrédulité et l’incompréhension la plus totale.

- Père…

Puis il remarqua la blessure dans la poitrine de l’Empereur-Dieu, l’épée ensanglantée dans sa main, et ses yeux s’emplirent d’effroi. L’Empereur se contenta de sourire.

- Qu’ai-je fait ?
- Ne t’inquiète pas, mon fils. La blessure que tu m’as infligée n’est pas mortelle. Tout cela, je l’avais vu. Tout cela fait partie de mon plan. Ecoute-moi attentivement, car nous n’avons que peu de temps. Je t’ai choisi car tu étais, entre mes fils, le seul à qui je pouvais confier cette tâche. Ta volonté est forte. Suffisamment pour faire face aux changements et à la tempête qui se profile. Suffisamment pour défier l’influence des puissances tapies dans le Chaos.
- Ainsi, vous saviez…
- J’ai cherché à les détruire, mais j’ai pris conscience avec amertume que la Grande Croisade censée les oblitérer était vaine. Ecoute-moi, Horus, car ce que je vais te dire t’accablera. Ton âme restera emprisonnée durant des millénaires, mais elle sera sauvegardée. Le moment viendra où tu seras libéré. Alors, une grande tâche t’incombera. Celle de livrer la dernière bataille pour le salut de mon âme. Le monde est en train de changer, ainsi que la vérité impériale. Mais cela est nécessaire. Et je me dois de laisser ces changements se produire.

Soudain, Horus convulsa. Son souffle se fit rauque et haletant. Ses traits se tirèrent sous le poids de la souffrance.

- Va, maintenant, mon fils. Ton corps est souillé, mais pas ton âme. Rappelle-toi de cela !
- Père !

Le cri du Maître de Guerre se mua soudain en un feulement éraillé, tandis que son âme était aspirée à nouveau hors de son corps. Ses traits se tordirent à nouveau, retrouvèrent leur pâleur diabolique. Ses yeux prirent la teinte de la braise, puis celle d’une noire fumée. Le visage de l’Empereur se durcit, et l’air se mit à trembler et à scintiller autour de ses épaules.

- Meurs, maintenant, démon !

Un éclair blanc et aveuglant foudroya le corps possédé d’Horus, tandis que sa chair se lézardait et se consumait de l’intérieur. Des runes hérétiques écarlates apparurent sur son corps, mais se brisèrent, tandis qu’un rugissement inhumain jaillissait de sa gorge. Ses yeux fumèrent, sa bouche exhala une fumée nocive… L’Empereur-Dieu plongea sa lame brûlante dans le cou du champion, et transperça sa tête dans un geyser d’étincelles. Une ombre funeste s’éleva en ondoyant au-dessus de son corps.

- Tu périras, homme !
- Disparaissez, engeances impies. Votre chute viendra, j’en fais le serment.

La fumée maléfique se dispersa, et le Souverain de l’Humanité se laissa choir, un sourire sur le coin des lèvres. Il entendit des pas empressés dans le corridor, et les nombreux cris de ralliement de ses loyaux guerriers.

Un autre combattant entra dans la vaste salle. Il était vêtu d’une armure d’or aux entrelacs complexes et surmontée d’un aigle jaillissant. Ses cheveux blancs et courts contrastaient avec le jais de ceux de son père. Il portait un tabard zébré de trois éclairs rouges et tenait une longue épée tronçonneuse au pommeau ailé. Son visage austère balaya la salle et s’emplit de chagrin en voyant la silhouette tombée de son frère. Puis ses yeux dérivèrent vers le corps de son Empereur, et ses traits se muèrent en une expression d profonde horreur.

Il se rua vers son suzerain et s’agenouilla à ses côtés, lâchant son arme pour soutenir ses épaules.

- Maître !

Le visage de l’Empereur-Dieu exprimait de la souffrance, mais demeurait fixé vers le cadavre inerte de son fils bien-aimé.

- Rogal…
- Je vais vous aider à vous relever, Monseigneur.
- Rogal, écoute-moi. Je me meurs. Je ne survivrai pas à cette blessure…
- Non !
- Horus est mort. Sanguinius est tombé. Je ne tarderai pas à les suivre… A moins…
- Que dois-je faire, mon père ?
- Aide-moi à regagner Terra, avant que mes forces ne me quittent…

Le Primarque des Imperial Fists souleva son Empereur et l’aida à marcher vers la sortie pour regagner son oiseau d’assaut. Des Astartes en livrée jaune et portant sur leur épaulette gauche le poing brandi de leur légion s’écartèrent, transis d’horreur. Ils les regardèrent passer en silence, trop accablés par cette vision pour pouvoir parler.

L’Empereur-Dieu se retourna, et sembla fixer Venria. Elle sentit son cœur s’arrêter de battre dans sa poitrine, tandis que les larmes continuèrent d’embuer ses yeux. Et il lui sourit avec affection.

Mais peut-être jetait-il seulement un dernier regard sur ses fils tombés…


Elle tombait. Ses jambes se dérobaient sous elle. Lentement, si lentement. Son regard brumeux fut soudain arraché à celui de l’inconnu, et elle bascula en arrière. Lentement, si lentement. Il souriait, mais son esprit était engourdi, et plus rien ne semblait avoir de sens. Les sons étaient étouffés, ouateux. Un gouffre sombre s’ouvrait sous elle. Un abysse de silence. Le monde semblait vague et indistinct. Ses sens cotonneux se muselèrent un à un. Elle ne sentait déjà plus son corps.

Son regard dériva le long des murs, vers le plafond, alors qu’elle chutait. Sa tête heurta le sol, mais même le choc lui sembla atténué. Alors que la torpeur se refermait doucement sur elle, elle vit le visage d’une femme sur un tableau noirci. C’était une femme aux longs cheveux noirs et au teint de porcelaine. Ses yeux étaient d’un bleu profond, et un mince sourire éclairait ses lèvres pâles. Elle était belle. Un temps, elle crut que c’était un miroir. Elle lui ressemblait tellement… Tellement.

Le puits d’obscurité se referma sur elle.

L’apparition continua d’avancer, et se pencha sur le corps de Vestra. Il leva une main, et la posa sur le crâne du traître. Le prêcheur hérétique hurla en se tordant de douleur. Il s’arqua violemment en arrière, tandis que sa chair commençait à noircir, à se consumer, à s’effriter. Sa peau se fissura et se morcela, ses vêtements s’embrasèrent d’un feu noir. Dans une atroce odeur de viande brûlée, sa chair se carbonisa, s’émietta en cendres, révélant un squelette noirci, qui à son tour se désagrégea en un panache de poussière. Il ne subsista plus qu’un crâne charbonneux dans la main de l’inconnu.

- Je suis le seul Prophète de l’Astre Tyran. Quiconque prétendra le contraire périra.

Le prophète serra la main, et le crâne éclata en des centaines de fragments anthracite. Puis soudain, il disparut comme il était venu, emporté par le néant. Comme s’il n’avait jamais été là. Comme s’il n’avait jamais existé…

mercredi 2 décembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.7



Les vagues grisâtres et chargées d’écume firent place aux eaux brunes et stagnantes des marais. Le ciel pâle fit place aux brumes ocres et pestilentielles. Sous le Xenoship, les silhouettes sombres des arbres noirs et squelettiques de la forêt noyée défilaient comme autant de spectres faméliques, leur écorce et leurs branches suintant et exsudant la pourriture. Des mains implorantes et tortueuses jaillissant de la vase, enserrant parfois dans leurs griffes le cadavre d’un animal rongé par les vers, ou la carcasse décharnée d’une embarcation humaine…

En face de lui, Urdos Garm fit cliqueter le chargeur de son bolter lourd pour en vérifier les balles. Zek méditait à l’écart, les yeux clos, tandis que Strygos ajustait ses gants noirs. Jocelyn décocha un clin d’œil à Constantine avant de boucler son holster autour de ses hanches. Ragaana, à peine remis des contrecoups du Warp, conversait fébrilement avec Dakka. Venria, quant à elle, scrutait le brouillard, enfermée dans le silence. Pericycllos était plongé dans la lecture d’un grimoire. Livan Tilbaren murmurait des prières muettes à l’Empereur-Dieu en humant les fumées serpentines de son bâtonnet d’encens. Plex jouait négligemment avec un cure-dents, mais ses mains se crispaient et se décrispaient tour à tour. Il avait besoin d’en découdre. Boucles d’Or, enfin, avait les yeux rivés sur l’horizon, aux commandes du Pellenshir.

Graham vint s’installer sur le siège de la gatling, ajustant son harnais et vérifiant les munitions et les pistons du gyrostabilisateur. Constantine regarda à travers les hublots et chercha à apercevoir les autres barges, qui se dévoilaient sporadiquement entre les méandres de la brume. Ils volaient bas pour éviter toute détection et le gros des tirs antiaériens. Mais il ne se faisait pas d’illusion. L’ennemi serait prêt pour les accueillir.

- Tu sais que c’est un piège, hein, Constantine, là. C’est toi qu’ils veulent, et tu vas dans la gueule du tigre-rasoir.

Il regarda Ragaana, rivant son regard au sien. De lourds cernes s’étaient creusés sous ses yeux, et ses lèvres étaient agitées de spasmes maladifs.

- Je sais, mais je dois découvrir pourquoi il cherche à me capturer.
- Hé, parfois, mec, vaut mieux laisser les trucs dormir…
- Pas cette fois-ci, Raga.
- C’est comme tu veux, mec.

Sans se détourner des schémas de trajectoire hololithiques qui défilaient devant ses yeux, Boucles d’Or avertit ses compagnons de sa voix monocorde de leur arrivée imminente.

Strygos se tourna vers les acolytes.

- Vous savez quoi faire. Le Pellenshir se positionnera au-dessus du port selon les coordonnées que nous a communiqué Constantine Marsimus. Vous serez le fer de lance. Mes acolytes couvriront votre avancée. Mais nous ne serons pas loin derrière. Une fois le port sécurisé, nous escorterons la techno-adepte jusqu’à vous. Faites en sorte de dégager le passage.

Dakka acquiesça en enfilant son gilet pare-balles et ses grenades en bandoulière.

- Nous savons que les ennemis se sont positionnés le long de l’enceinte de l’ancienne ville. Des chasseurs produiront un tir de barrage pour nous permettre de percer les défenses et de cibler le cœur de la cité, l’ancien palais Narsès.

Pour faire écho aux paroles de Graham, ils entendirent résonner les premiers tirs des batteries sol-air. Les projectiles sifflèrent, suivis de déflagration. Le vaisseau vibra sous les explosions…

- Accrochez-vous.

A l’avertissement de Boucles d’Or, tous se cramponnèrent aux rambardes.

Boucles d’Or inclina soudain le manche. Le Pellenshir piqua vers les eaux brunâtres, tandis que tout dans l’habitacle se mettait à cahoter avec furie. Elle commença à louvoyer à quelques mètres du sol. Le vaisseau dessina de hautes stries dans son sillage, ses réacteurs soulevant de lourdes masses d’eau à plusieurs mètres au-dessus du sol. Derrière eux, l’eau laissait une bruine irisée en retombant.

Ils jurèrent tous sous le coup du choc de l’accélération. La mâchoire crispée, Constantine respira par saccades. Venria sembla soudain exulter, tandis que Garm grognait lui aussi, sa taciturnité soudain fissurée sous le coup de l’excitation. Dakka resta immobile, les yeux clos. Combien de fois avait-il ainsi débarqué sur une zone de guerre ? Il ne pouvait rien faire. Juste prier pour son salut et celui de ses compagnons.

Des branches rabougries craquèrent sourdement contre la coque. Les arbres décrépits éclatèrent sur leur passage. Au-dessus d’eux, des déflagrations continuaient d’agiter les cieux. Un lander explosa en plein vol, frappé de plein fouet par un missile. Le vaisseau embrasé s’abîma dans les eaux putrides en propulsant un geyser de boue, laissant une mare de Prométhéum incandescent aux volutes de fumée noirâtre…

Le ciel n’était plus qu’une pluie de projectiles incandescents. Une autre barge fut criblée de bolts lourds. Le vaisseau dériva, disparut un instant dans les lambeaux de brume, avant de s’entrechoquer à un autre appareil. Le premier se désintégra sous le choc tandis que le second disparaissait dans une traînée de napalm ardent.

Le Pellenshir perça une langue de brouillard. Devant eux se dressait enfin l’ancien castel des Narsès, devenu une sombre nécropole abandonnée, un tombeau régnant sur les marécages. Constantine fixa des yeux son domaine en ruines, ses tours effondrées, ses fenêtres désormais vides comme les orbites de centaines de morts. Au-dessus de la forteresse, deux vaisseaux fuyaient vers l’espace.

Boucles d’Or passa à côté d’une muraille délabrée. Une batterie antiaérienne y avait été positionnée. Les tirs ricochèrent sur le bouclier et le blindage du Xenoship, faisant trembler le cockpit. Elle suivit son avancée, cinglant sa coque sur tout son long, mais ne parvint pas à interrompre sa progression. Le Pellenshir frôla l’arme, et la noya sous des trombes d’eau…

D’autres vaisseaux alliés se placèrent en couverture de celui de l’Inquisition, afin d’empêcher les autres batteries de le cibler. Tout autour, des barges heurtaient les murailles et débarquaient des hommes. Les pontons s’ouvraient, et les soldats d’Orcan s’élançaient avec ardeur et courage. Les pirates du Syndicat, lourdement armés et caparaçonnés, affrontaient dans une danse de mort et de sang le fleuron des armées d’Ascandia.

Sur toute la ligne de front, des combats éclatèrent. Mais le Pellenshir n’interrompit pas sa course. Il fila droit vers la citadelle. Graham hurla aux autres acolytes.

- Nous avons percé le premier périmètre !

L’assassin ouvrit les panneaux latéraux de l’appareil, qui se déplièrent en laissant soudain entrer un vent cinglant et vociférant. Le poste de tir coulissa le long de rails pour se placer juste à l’extérieur du vaisseau, dans le grincement des vérins hydrauliques.

Le Pellenshir s’infiltra dans le port, au milieu des épaves de bateaux putréfiés. Les navires gisaient dans la fange comme les ossements de grands géants décharnés, là où ils avaient été coulés par les salves des canonnières adverses. Une forêt de mats et un cimetière de figures de proue larmoyantes… La haute flèche gothique du phare reposait dans les flots, décapitée, inclinée à quarante-cinq degrés comme en signe de soumission. Sa base était encore visible, à l’extrémité de la muraille, telle une souche élimée.

De l’autre côté, le beffroi se dressait encore fièrement, défiant, malgré les nombreux dégâts causés par les boulets de canons. La cloche qui avait sonné l’arrivée des troupes ennemies était encore engoncée dans sa pointe, mais elle était désormais rouillée, morne vigie silencieuse…

Des oiseaux s’envolèrent à l’arrivée du vaisseau, nuées bondissantes de noir et de blanc. Un échassier au long bec anthracite déploya ses longues ailes et fila vers le nord…

Les quais étaient couverts de gravats, les pontons arqués par le poids des années. Les marches menant des docks à la citadelle étaient obstruées par des pans de murs, des colonnes, des arches, qui s’étaient effondrés sous le pilonnage des balistes et des bombardes. Les fenêtres et les balcons, autrefois sertis de verres colorés et de vitraux, étaient désormais béants, comme des bouches soupirantes.

Mais aujourd’hui, ces ouvertures vomissaient des soldats hors-monde…

Ils se déployèrent rapidement sur les embarcadères et les appontements, avec une cohésion admirable, s’abritant derrière les éboulis, se couvrant mutuellement et se mouvant avec efficacité. Ces mercenaires étaient rompus au combat, et leur attirail ne laissait pas de doute sur leurs intentions. Ce n’était plus de simples éclaireurs spécialisés dans les interventions brèves et rapides, comme ils en avaient déjà rencontrés à Olrankan, mais des guerriers farouches et habitués à tuer. Ils arboraient une lourde armure pour une protection optimale, et brandissaient des bolters meurtriers.

La gatling de Strygos siffla en tournoyant, puis vociféra en arrosant l’ennemi d’un déluge de bolts. Partout, la pierre blanche éclatait, des panaches de poussière et de gravats giclaient et fusaient. Une statue fut criblée d’impacts de la taille d’un poing avant de s’effondrer et de rejoindre le reste des décombres.

Dakka sauta de l’engin, atterrissant lourdement sur le ponton. Sa jambe transperça les planches avariées. Il la retira sans se démonter, mit un genou à terre et se mit à canarder. Venria le suivit de près, profitant de son tir de couverture pour se réfugier quelques mètres en aval. Ce fut au tour de Ragaana et de Zek. L’assassin roula avec grâce sur le sol avant de s’élancer sur la droite, sans même marquer de pause. La racaille rejoignit Venria sur la droite, s’adossant au pilier couché en travers de leur route. Le chaman sauta au-dessus du pilastre pour ne pas se faire distancer par l’acolyte d’Ark-Ashtyn.

Constantine bondit à son tour, mais le bois pourri et fragilisé céda sous son poids. Il tomba à la renverse dans les eaux boueuses, se redressa en toute hâte en recrachant l’eau putride. Il scruta les environs, et se dirigea vers la berge, mais entrevit un moyen de contourner les défenseurs.

Venria dégoupilla une grenade et la lança vers les lignes adverses. La détonation envoya valser des éclats de pierre et de poussière. Dakka en profita pour avancer, catapultant lui aussi une grenade. Plex sauta hors de son abri et se fraya un chemin sur la droite, suivi de Venria.

Zek décochait couteau sur couteau, forçant l’ennemi à baisser la tête, tandis que Ragaana passait derrière lui et filait droit vers les eux. L’air siffla et se mit à luire d’une lueur verdâtre autour de lui, tandis que ses mains noircissaient et s’allongeaient pour former des griffes effilées et disproportionnées.

Le corps d’un mercenaire tournoya dans les airs, ses jambes arrachées par l’explosion. Plex ficha deux balles dans le torse d’un autre, tandis que les décharges de Venria mettaient un troisième adversaire à terre. Strygos continuait de mitrailler les stipendiés, et plusieurs s’effondrèrent lacérés.

Dakka fit choir un ennemi d’une balustrade, et continua d’avancer pas à pas, ses courtes rafales dardant à droite et à gauche. Derrière lui, Urdos Garm et Quint se laissèrent tomber sur les quais, et joignirent leurs tirs à ceux des acolytes.

Ragaana transperça de part en part un ennemi, avant de l’éviscérer. Le couteau de Zek taillada l’artère d’une cuisse, avant de trouver la gorge d’un deuxième opposant. Les longues lames du chaman firent sauter une tête, qui retomba mollement sur le sol dans des éclaboussures squameuses de sang.

Constantine émergea des décombres du système de canalisation. Deux mercenaires se tenaient dos tourné, trop occupés à viser ses camarades. Il arma son fusil d’assaut. Ses rafales impitoyables les jetèrent à genoux, le dos arqué sous le coup de la douleur soudain, et ils s’effondrèrent en convulsant.

Pris entre deux feux, les défenseurs furent massacrés, malgré toute leur hargne et leur expérience. Le dernier combattant s’affaissa lentement, du sang suintant de sous son casque. Les acolytes haletaient, mais ce n’était pas encore le moment de se reposer.

Constantine franchit la haute porte d’entrée, ses pas résonnant dans le hall désert. Des bribes de souvenirs défilaient de manière fugace dans son esprit. Des images de jours meilleurs, où ces ruines étaient encore bouillonnantes de vie et d’agitation… Des marchands déposant des caisses, des bateleurs au rire rauque. Sophia et lui, jouant à cache-cache dans les alcôves et les corridors. Mais ce temps était révolu, et il ne subsistait que des vestiges délabrés. C’était bien un tombeau, un caveau sombre et silencieux…

Il les guida dans le dédale de la citadelle. Il les connaissait encore par cœur. Il réprima l’envie de prendre le grand escalier central et de passer dans les anciens appartements de sa mère, préférant couper à travers les quartiers des serviteurs, les cuisines, puis se frayer un chemin à travers les offices des scribes et les geôles. Il s’attendit parfois à entendre le ton courroucé d’un précepteur, lui demandant ce qu’il faisait là. Mais les couloirs étaient déserts et dénués de vie.

En longeant les cachots, il entendit le raclement de chaînes et un sanglot étouffé. Il lorgna à travers les barreaux de la cellule, pour voir une frêle silhouette maladive. L’odeur des excréments et de l’urine était forte, celle de la décomposition aussi. Une jeune fille le regardait, terrifiée, les yeux fous et hagards. Ses cheveux sales et gras lui retombaient sur le visage, et elle était quasiment nue sous ses haillons. Sa peau pâle était meurtrie par de nombreuses ecchymoses… Elle ne devait pas avoir plus de quinze printemps.

Dans la geôle voisine, un vieil homme était en train de gémir, complètement dénudé. Son corps flasque était recouvert de mucus translucide, et constellé de trous suppurants. Il lui manquait son bras gauche, et la blessure avait été grossièrement suturée au niveau de l’épaule. C’était comme s’il avait été dévoré par des asticots, tout en restant en vie. Mais malgré son apparence cadavérique, Constantine le reconnut. Feldren Spiel, l’ancien intendant de son père…

Dans la troisième cellule, une femme d’une quarantaine d’année était allongée sur le dos, sans vie. Ses jambes avaient été coupées, l’une au genou, l’autre à la hanche, de la même manière que le bras de Spiel. Des vers noirs grouillaient sur sa peau comme des phalanges boursouflées. Il la reconnut aussi, Lisara, l’une des dames de compagnie de sa mère. Il se souvint qu’elle l’avait bercé et lui avait murmuré des paroles douces et réconfortantes, alors que les canons faisaient trembler le palais…

Ils ne pouvaient pas encore s’occuper des prisonniers. Ils reviendraient les délivrer une fois leur mission accomplie…

L’odeur de la putréfaction s’intensifia soudain, au point de devenir suffocante. Les acolytes se figèrent sous le coup de l’horreur. Devant eux se dressait un charnier immonde. L’ancienne salle des jugements était remplie de cadavres blafards. Les corps étaient entassés, leurs membres entremêlés dans une étreinte funeste, formant un monticule de plusieurs mètres de haut. Constantine lutta pour ne pas vomir. Il y avait des femmes, des hommes, des enfants, tous dans un état de décomposition avancée. C’était donc à cet endroit que le Syndicat amenait tous les corps… Mais pourquoi ?

Venria se détourna de ce spectacle morbide. Que se passait-il ici ? Elle entrevit un mouvement dans les ombres. Quatre soldats sortirent de couloirs attenants. Ils combattirent parmi les cadavres, leurs yeux à demi liquéfiés les dévisageant avec reproche.

Une fois le dernier des assaillants tué, ils quittèrent cet endroit. Graham demanda à Tilbaren de s’occuper des prisonniers. Ils ne pouvaient décemment pas les laisser à proximité d’une telle infamie…

Les lourdes portes de la salle du trône étaient à demi closes. Elles se dressaient devant eux, menaçantes. Constantine observa l’endroit où le bélier avait fait céder la barre. Il ne se souvenait que trop bien des coups assourdissants, des cris étouffés de Lisara et de Nella. De Gyserus tirant son épée. De sa mère lui murmurant que tout irait bien… Pourquoi ne se souvenait-il pas de son visage ?

Urdos et Strygos ouvrirent chacun un battant de la porte, dont les charnières crissèrent douloureusement. La longue complainte résonna dans la salle avant de se taire, comme une nuée de harpies.

Tout le long de la salle cérémonielle, des flambeaux avaient été allumés à la base de chaque colonne massive. Ils brûlaient d’une lueur verdâtre et sépulcrale. Entre chaque pilier, les fenêtres en ogive étaient obstruées par de lourds rideaux mités, plongeant la pièce dans une pénombre angoissante… De l’autre côté, sur l’estrade seigneuriale, une silhouette massive et corpulente se dressait devant l’antique trône des Narsès, auréolée d’un dais en lambeaux.

Vêtu d’atours princiers, élaborés à mi-chemin entre les habits d’un prêtre et d’un marchand de haut rang, Coriolanus Vestra fixait les nouveaux arrivants avec un sourire carnassier peint sur le visage. Ses bajoues flasques et fardées s’évasaient en un hideux triple menton. Ses yeux étaient grimés, mais son maquillage coulait autour de ses yeux injectés de sang. Son crâne chauve luisait dans la lueur morbide, tout comme les lisérés d’or de ses vêtements. Mais tout en lui respirait la décrépitude. Sa chair était maladive, tâchée autour des lèvres, ses habits étaient déchirés et élimés, son vernis à ongles noir était écaillé…

Il était aussi grand qu’il était obèse, mais son embonpoint n’atténuait en rien le sentiment de danger qu’il dégageait. Peut-être était-ce à cause de la pantagruélique épée tronçonneuse qui était plantée dans le sol à côté de lui… Sa main était posée sur son pommeau en forme d’astre d’onyx, mais il la retira pour écarter les bras en signe de bienvenue.

- Bienvenue, cher Constantine Narsès. Sais-tu que j’ai écumé ciels et terres à ta recherche… Et voilà que tu te présentes à moi. Béni soit l’Empereur-Dieu ! Ma patience et mes efforts ont été récompensés !

mardi 1 décembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.6



Les acolytes des deux unités se retrouvèrent en Osquie mineure, au-delà des frontières d’Ascandia, à la lisière du Duché de Nunka. Le Pellenshir se posa doucement dans la clairière abritée où patientait la navette de Strygos et de ses compagnons, l’air brûlant de ses réacteurs fouettant et embrasant les herbes hautes.

Graham Strygos salua Zek et lui demanda des nouvelles de son inquisitrice. L’assassin d’Ark-Ashtyn le remercia de sa sollicitude sur un ton ironique, ce qui n’échappa pas à son homologue. Les deux groupes se concertèrent alors, étudiant leurs possibilités d’action.

Ils avaient découvert lors de leurs investigations en Evaness que les mines d’Electrogyre étaient désormais détenues par l’Honorée Guilde de l’Alliance Céleste. Un mandat impérial lui avait été alloué par l’Administratum pour lui garantir le monopole du marché. Mais ce n’était pas tout. Les archives mentionnaient un début d’exploitation bien antérieur à la découverte officielle du minerai. Les gisements avaient été enregistrés en 806M41 dans les registres, mais les premières excavations avaient commencé en 775M41. Et les propriétaires de ce gisement étaient le Clan O’Dientro…

Ils avaient aussi assisté à d’inquiétants préparatifs de guerre. La Synarchie Evanessine et son Prince Polémarque craignaient les velléités belliqueuses d’Orcan. On murmurait que le Régent souhaitait lancer une croisade contre Evaness, avec pour seuls enjeux le contrôle des mines d’Electrogyre et le maintien du Royaume d’Ascandia en tant qu’interlocuteur privilégié d’Acreage auprès des autorités impériales.

Qui contrôlait les mines disposerait des faveurs de l’Imperium…

D’après les recherches de Pericycllos, l’Electrogyre était un matériau psychoactif et psychocinétique. Maniée par un épéiste, une lame d’Electrogyre pouvait projeter une force cinétique induite par le seul mouvement de l’arme. Même esquivée par l’adversaire, l’attaque d’un bretteur pouvait infliger des blessures et des concussions par la seule force dégagée par le passage de l’arme.

Mais ce n’était pas tout. L’Electrogyre avait une propriété particulière. Manié par un Psyker, un objet de ce matériau entrait en résonnance avec tout autre objet issu du même gisement, mais pas d’un autre. Ainsi, les Psykers pouvaient activer, de manière télécommandée et sans restriction de distance, des mécanismes situés à l’autre extrémité de la galaxie par leur seule pensée. Mais aussi toute une série d’instruments, séparés par des distances faramineuses et précisément au même instant, sans délai aucun entre les dispositifs. Deux Psykers pouvaient dialoguer entre eux sans passer par un astropathe, même éloignés de milliards de kilomètres…

De leur côté, Constantine et ses compagnons leur parlèrent de leurs découvertes, et de la localisation de Vestra. Un temps, toutes les inimitiés entre les deux unités disparurent, alors qu’ils coordonnaient leurs efforts pour mener à bien leur mission.

Malgré toutes leurs précautions, ils s’aperçurent qu’ils avaient été vus par la population locale. Un osquien se présenta à eux en rampant, les mains en prière au-dessus de sa tête courbée. Il s’adressa aux acolytes comme s’ils étaient des dieux. Pericycllos parvint à traduire ses paroles. Cet humble paysan souhaitait que les « Chevaucheurs de Dragons » l’accompagnent pour reprendre la « bête » qu’ils lui avaient confié, et qui dévorait le fruit de ses récoltes, buvait le sang noir de la terre et empêchait ses troupeaux de se reproduire. Ils comprirent vite que les dirigeants de la Théocratie Osquienne lui avaient offert une machine. Une machine pour accroître ses rendements, où il versait son blé et récupérait les graines triées.

L’industrialisation galopante de cette région faisait écho à la politique de modernisation d’Orcan… Les Théocrates avaient peur des ambitions que pouvaient nourrir le Régent, et ne pouvaient se laisser distancer technologiquement parlant. Ils avaient semblait-t-il eux aussi entrepris d’introduire des machines dans les diverses strates de la société. Mais les réformes étaient trop rapides, forcées, et n’étaient pas suivies par une politique d’éducation ou de formation efficace. Les superstitions étaient encore fortement ancrées, et le peuple était arraché brutalement d’une ère de mythes et de folklore pour entrer dans un âge de progrès technologique…

Ils laissèrent le fermier à ses angoisses. A travers ses larmes, ce dernier regarda avec terreur les « dragons » s’élever dans le ciel, leurs gueules auréolées de flammes infernales. Il resta là, pantelant et tremblant, laissant les vents déchaînés frapper son visage…

Sur le trajet, Pericycllos envoya une requête d’assistance dans tous les systèmes voisins, avec pour objectif d’attaquer le vaisseau du soi-disant Mortus-Charonis qui orbitait encore autour de la planète. Un contingent du Divisio Immoralis, une section spéciale de l’Adeptus Arbites spécialisée dans la traque d’hérétiques, répondit à l’appel et envoya un vaisseau pour engager le vaisseau ennemi.

Lorsqu’ils arrivèrent à Olrankan, les acolytes eurent la mauvaise surprise de se faire recevoir par une délégation de la Garde Palatine. Orcan les attendait, sous bonne escorte, fulminant comme jamais. Il entra en trombe dans le Pellenshir, tressaillant de dégoût en posant les yeux sur l’architecture Xeno du vaisseau. Et tira son épée.

Venria se dressa face à lui pour lui barrer le passage, devinant la raison de sa visite. Orcan se figea soudain, et posa des yeux horrifiés sur elle. La Sororitas vit l’épée du Régent luire d’une pâle lueur bleutée. Quelqu’un derrière elle hoqueta de surprise. Ses yeux dérivèrent vers ses propres bras. Des lignes entrelacées couraient sur sa peau en délicates arabesques, illuminées d’une lueur bleuâtre… Elle fut prise de vertiges, et eut l’impression désagréable qu’on lui comprimait le cerveau.

Dakka vit l’épiderme de Venria se couvrir de tatouages bioluminescents. Son visage, ses bras… tout son corps semblait palpiter de la même lueur qui filtrait de l’épée. Venria cria. Orcan leva sa lame, aussi étonné que l’acolyte, et fit un pas en arrière, puis un autre... La peur se lisait dans ses yeux.

La lumière disparut petit à petit de l’arme et de la peau de Venria. La Sororitas posa une main sur le mur du vaisseau, clignant des yeux. Une terrible lassitude passa sur elle, et elle se sentit accablée par la solitude, le doute… le profond sentiment d’être abandonnée, comme si soudain, le monde perdait son sens, se brisait sous ses yeux. Puis l’impression reflua.

Constantine posa une main sur son épaule et s’avança.

- C’est moi que tu cherches.
- Ainsi, c’était vrai… Tu oses revenir, Narsès ! Tu aurais mieux fait de rester hors de portée de mon influence ! Cette fois-ci, je ne te laisserai pas filer. Tu vas regretter cette erreur ! Gardes !

Six soldats avancèrent à l’unisson, brandissant leurs hallebardes.

- Oserais-tu t’en prendre à un serviteur de l’Inquisition, Orcan ? Feras-tu cette erreur ?

Orcan le toisa, grimaçant de haine. Les soldats s’étaient figés sur place. Constantine le dévisagea. Son ennemi. Le meurtrier de ses parents. Il vit l’arme qu’il tenait. Horizon, l’épée de son père. De leur père… Il sentit la haine passer en lui, bouillonner… Sa main chercha la garde de son épée. Mais il retint son bras.

- Nous avons à discuter, mon frère.

Orcan écarquilla les yeux. Ses yeux dardèrent vers ses soldats, puis de nouveau sur Constantine. Ce dernier lui indiqua de la main une pièce du vaisseau.

- J’imagine que tu préférerais un tête-à-tête ?
- Si tu tentes quoi que ce soit, servant de l’Inquisition ou non, ma garde aura ta tête.

Les deux hommes passèrent la porte en se jetant des regards venimeux…

Ils se toisèrent un long moment, pleins de fiel et de morgue. La mâchoire serrée, Constantine laissa défiler ses souvenirs. Sa rage, sa vindicte, sa détresse… Il les laissa le submerger complètement. Il les laissa noyer son ancien lui. Il ferma les yeux alors qu’il faisait le deuil de sa vie passée. Lorsqu’il ouvrit les yeux, il exhala longuement, et avec, souffla au loin ses anciens souhaits, ses anciens rêves… et prit sa décision.

- Je suis Constantine Marsimus, acolyte au service de l’Inquisiteur Magnus Roake, du Saint Ordo Hereticus. Et je ne suis là que pour une seule chose. Traquer un hérétique…

Au dehors, sous couvert de leur autorité, les acolytes questionnèrent un officier de la milice. Il y a quelques heures, au moment de l’offensive sur l’entrepôt du Mortus-Charonis, les cinq vaisseaux qui avaient déposé les deux cent cinquante agents de la secte, avaient redécollé sans autorisation et tenté de pénétrer l’espace interdit. Deux avaient été abattus, mais trois autres étaient parvenus à rallier le continent.

Les trois vaisseaux avaient rejoints l’Almighty Sun au Canal de l’Aquila et avaient cherché à les rembarquer à leur bord. Le Seigneur Gurst avait décidé d’intervenir, avec une force armée de mille hommes. De nombreux prêtres furent tués en dépit de leur résistance acharnée. Mais près de cent cinquante sectateurs étaient parvenus à remonter à bord, emportant avec eux un étrange appareillage.

Les canons des vaisseaux et les armes sophistiquées des adversaires avaient causé de lourdes pertes parmi les assaillants. Deux cent cavaliers et quatre cent fantassins avaient péri, contre seulement cent des leurs. Les vaisseaux étaient alors partis vers le nord-ouest en survolant les terres Angelus. Sans l’arrivée dans leur dos des renforts envoyés par la garnison méridionale de la Maison Angelus, le nombre de morts aurait été bien plus élevé…

Puis le Régent avait reçu une communication d’un certain Coriolanus Vestra, lui intimant de lui livrer Constantine Narsès s’il voulait éviter plus d’effusions de sang.

Profitant qu’ils étaient seuls, Pericycllos lorgna du côté de Venria.

- Pourriez-vous m’expliquer, ma chère, pourquoi vous semblez arborer des tatouages d’Electrogyre, qui plus est du même gisement que celle qui a servi à façonner l’épée du Régent ?

Venria se détourna sans même lui répondre. Elle n’avait pas la réponse à cette question…

Quelques minutes plus tard, Constantine et Orcan sortirent enfin. Si l’animosité se lisait encore dans leurs yeux, une entente semblait avoir été trouvée. Les troupes du Régent allaient prêter assistance aux acolytes pour un assaut sur l’ancien palais Narsès.

Les deux hommes se séparèrent pour organiser leur assaut conjoint. Constantine soupira. Il n’avait pas eu d’autre choix que de laisser Orcan déclarer les insurgés traîtres s’ils ne déposaient pas immédiatement les armes. N’étaient-ils pas financés par Coriolanus Vestra, à travers ces prêtres du Mortus factices ? Tel avait été le prix de sa coopération…

Pericycllos et Boucles d’Or étudièrent les banques de données récupérées à la morgue du Mortus. Du moins celles qu’ils étaient parvenus à sauver ou à restaurer informatiquement… En croisant les références, le montant des sommes, les cargos utilisés pour faire transiter les armes et les provisions, ils découvrirent l’identité véritable des prêtres du Mortus-Charonis.

Le Syndicat Amaranthien.

L’Amaranthe était le nom d’une alliance interstellaire de commerçants, de guildes de commerce, de familles nobles, de maisons marchandes mineures, de capitaines chartistes et de clans Void Born. Issu de l’Abysse d’Hazeroth, ce syndicat s’implantait désormais dans l’Etendue Josienne, et malgré leur expansion économique fulgurante, il était encore considéré comme une fédération secondaire par les autorités du Secteur. Mais des rumeurs avaient vu le jour. Certains employés de l’Arbites avaient mis en lumière des pratiques douteuses et des négoces illégaux. On parlait entre autres d’actes de piraterie, de commerce de xeno-artefacts illicites... Le Cartel avait acquis au fur et à mesure des décennies une réputation sinistre.

Pericycllos leur fit part des dernières rumeurs à leur sujet. Si cette ligue se donnait l’apparence d’un vague rassemblement de marchands indépendants, on murmurait qu’elle était en réalité structurée de manière pyramidale, avec à sa tête les mystérieux et chimériques Principati. Aucune preuve n’avait jusque-là été découverte, et l’organisation n’avait jamais été inquiétée dans son ensemble. Seuls les contrevenants directs avaient été exposés à la sainte justice et au châtiment intransigeant des Hauts-Juges de l’Adeptus Arbites, mais les chambres procédurales ne désespéraient pas de condamner la totalité de cette coalition mafieuse.

Il n’était pas étonnant que des membres de ce syndicat se fussent acoquinés à Coriolanus Vestra, ni que ce dernier fît appel à eux, car ils plaçaient le profit avant toute autre chose, et avaient des moyens conséquents à leur disposition. C’était un groupement impitoyable, qui ne reculait devant rien – chantage, extorsion, meurtre, corruption… – pour parvenir à ses fins.

Constantine observa les mouvements de troupes en contrebas. Il les regarda se positionner en rangs impeccables, avec une ferveur et une rigueur toute impériale… Le ciel était clair sur la pointe du Cimier, l’archipel qui marquait la séparation entre les eaux saumâtres des marais et les flots salés de la Mer des Cendres. Orcan y avait érigé sa nouvelle académie, au sein d’une forteresse cyclopéenne. Des mouettes piaillaient dans le pâle azur. Il les regarda dériver longuement au-dessus de sa tête, scrutant les ombres de leurs ailes déployées… Puis les réacteurs hurlèrent.

Le Pellenshir s’éleva dans les airs au milieu de myriades d’autres vaisseaux. A leur bord, les troupes d’élite d’Orcan. Quatre mille hommes formés à l’Académie réformée, au maniement des armes à distance et aux tactiques militaires impériales. La nouvelle génération de soldats et d’officiers aux standards des forces de défense planétaire, pour remplacer les chevaliers désuets, cavaliers archaïques et autres fantassins surannés…

Les barges de débarquement s’élancèrent au-dessus de la mer cendrée telle une nuée de monstres ailés, et Constantine regarda l’armada filer droit vers ses anciennes terres et son ancienne demeure. Vers là où tout avait débuté.

lundi 30 novembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.5



Les aiguilles sifflèrent à travers la salle, faisant éclater des verres, des bouteilles, scarifiant le bois des tables, des chaises, du comptoir… Constantine plongea derrière une lourde desserte, entendant les aiguillons claquer sourdement dans le meuble. Dakka se plaqua contre le montant de la porte et fit vociférer son fusil mitrailleur en direction des assaillants. Dans des panaches de poussière, les vitres, les pots de fleurs, les lanternes éclatèrent, tandis que les mercenaires se mettaient à l’abri.

Profitant de ce tir de couverture, Constantine s’élança en direction de la porte arrière de la taverne, suivi de près par Ragaana et Zek, tandis que Dakka et Venria assuraient leurs arrières. Ils passèrent à côté de l’aubergiste qui hurlait sous le coup de la terreur, prostré derrière le comptoir, alors que des bris de verre et de la poussière lui tombaient sur la tête. D’un coup de pied, Constantine défonça la porte, qui claqua contre le mur, et il écarquilla les yeux.

L’un des deux autres vaisseaux s’était placé en vol stationnaire au-dessus des toits, juste derrière l’auberge. Des hommes s’étaient positionnés sur les faîtages, abrités derrière des cheminées, et les visaient, tandis que d’autres descendaient encore de l’appareil.

Les éperons effilés cliquetèrent sur le sol pavé alors que Constantine se mettait à courir. Zek et Ragaana lui emboitèrent le pas, impuissants. Dakka arriva à la porte et reporta son attention sur les nouveaux belligérants. Son feu nourri fit exploser les tuiles. L’un des attaquants eut le malheur de réagir trop tard. Son corps convulsa alors que deux gerbes de fines gouttelettes de sang jaillirent de son torse en une brume rubiconde. Derrière lui, Venria retenait toujours les agresseurs dans le mince corridor.

Elle passa la porte à son tour, rasant les murs. Dakka lui adressa un coup d’œil, son doigt encore crispé sur la gâchette. Puis il s’élança à sa suite.

Constantine cavala dans les ruelles, déboucha sur une grande artère exposée. Il entrevit les ombres d’autres assaillants les suivre depuis les toitures, sautant de maisonnée en maisonnée. Il ajusta son pistolet, manqua sa cible en étouffant un juron. En bas de l’avenue, quelques mercenaires avaient contourné la taverne et montaient vers eux.

Il regarda brièvement dans la direction opposée, tandis qu’ils étaient rejoints par Dakka et Venria. Le dernier appareil s’était placé en interception, torpillant les batteries antiaériennes de missiles et de bolts incendiaires. Ils ne pouvaient pas fuir indéfiniment… Les torpilles vitrifiaient le haut de la cité et la base du palais. Un déluge de Prométhéum enflammé… Il se tourna avec réticence vers les assaillants.

- Que voulez-vous ?

Un mercenaire lui répondit sans se dévoiler de sa cachette. Dakka pointait toujours son arme dans leur direction, tandis que Venria faisait face aux stipendiés qui remontaient l’avenue.

- Vous, Constantine Narsès. Suivez-nous sans résistance, et nous épargnerons vos compagnons.
- Qui êtes-vous ?
- De simples agents envoyés pour vous appréhender. Ce que nous ferons. A vous de choisir si cela se fera dans le calme ou dans la violence.

Les renforts arrivèrent à proximité du lieu de confrontation. Quatre hommes armurés et masqués, leurs armes pointées vers eux de manière inflexible. Dakka lorgna vers les nouveaux arrivants, gardant en joue ceux du surplomb. Il y en avait trois là-haut, d’après ses estimations. Ce qui portait le nombre d’ennemis à sept. Mais d’autres ne tarderaient pas à venir. Il essuya une goutte de sueur qui perlait de son front. Ils seraient alors en écrasante supériorité numérique.

Venria faisait face à quatre mercenaires, fusil à pompe à la main. Leurs armes étaient braquées sur elle. Au moindre de ses gestes, ils n’hésiteraient pas à tirer… Et elle n’en sortirait pas vivante. Elle cligna des paupières pour chasser la transpiration qui commençait à couler dans ses yeux.

Dakka s’adressa à Constantine en faisant un bref signe de tête à Ragaana, qui le lui rendit.

- Comme si on allait les laisser faire. Qu’ils aillent au diable.

Zek approcha furtivement ses mains de son plastron, où étaient alignées une dizaine de couteaux de lancer. Constantine regarda Dakka, puis Venria. La tension grimpa d’un cran.

- Je me dois de refuser.

Dans un même mouvement, Venria tira dans le torse du premier mercenaire, qui vola en arrière sous le coup de l’impact. Dakka arrosa les toits de balles, tandis que les douilles giclaient en cascades de son fusil mitrailleur. Un couteau s’enfonça profondément dans la gorge d’un autre assaillant, tandis que Zek tournoyait déjà vers un autre adversaire, lame à la main. Le soldat tomba à genoux en portant une main gantée vers son cou alors que le sang bouillonnait hors de son respirateur. Son autre doigt se crispa sur sa gâchette, et une rafale érafla l’épaulette droite de la Sororitas.

Le vaisseau placé en couverture explosa soudain sous les tirs des systèmes de défense de la cité. Sa carcasse flambante tomba sur un immeuble, qui s’effondra sur lui-même dans un panache de flammes, de fumée noire et d’étincelles.

Un projectile lacéra la cuisse de Dakka. Le Fedridien fut forcé de se rabattre pour éviter les tirs qui provenaient des toits. Une rafale rabroua Zek tandis qu’il lançait un autre couteau. Il tomba à la renverse dans les gravats, avec le goût du sang dans la bouche. La lame cliqueta contre le casque d’un ennemi sans parvenir à l’entailler et tinta contre les pavés. Des balles martelèrent l’armure de Venria et trouvèrent sa chair. Elle s’effondra à son tour.

C’est alors que Constantine l’entendit arriver. Le colosse de métal tourna le coin d’une ruelle, alerté par les déflagrations. Ses pas pilonnèrent le sol tandis que son buste pivotait pour leur faire face. Ses canons rotatifs commencèrent à tournoyer, prêts à déverser une pluie mortelle d’acier… Un Géant de
Fer. Sous sa carapace de métal corrodé, une lumière verdâtre pulsait au niveau de ses articulations. Une vapeur lugubre s’échappait de ses tuyaux de refroidissement.

Ragaana psalmodiait. L’air frémissait autour de sa silhouette, tandis que du givre psychique couvrait les pavés et les murs des bâtisses les plus proches. Il exhala une vapeur glacée tandis que ses yeux s’illuminaient soudain d’une lueur spectrale… Ses mains dansaient dans les airs, fouettant les effluves moirées qui suintaient de sa chair. De fugaces symboles exagrammatiques jaillirent de sa bouche, tandis qu’il sentait les courants du Warp se déverser en lui et hors de lui…

Tout le monde fut pris d’un vague vertige. Soudain, toutes les armes cessèrent de fonctionner ou s’enrayèrent. Les gâchettes cliquetèrent dans le vide. Le Géant de Fer se figea alors que ses canons ralentissaient, et il s’inclina tandis que ses systèmes s’éteignaient. Constantine se détourna du géant désormais inanimé. Venria dégaina son épée tout en pressant ses blessures, et l’enfonça dans la poitrine du mercenaire qui lui faisait face. L’homme s’affaissa en beuglant, essayant encore de comprendre pourquoi son pistolet l’avait lâché.

Le dernier adversaire jeta son arme pour tirer sa propre lame. Ragaana le toisa du regard, et encore investi des forces de l’Immaterium, les focalisa sur ses mains. Il exulta, prêt à lacérer son ennemi. Mais les griffes noires ne s’étirèrent pas, et nulle puissance n’en émana. Surpris, il persista, sans se rendre compte des remous qui agitaient nerveusement les marées du Warp.

Un torrent furieux déferla sur le Psyker, qui ne put qu’écarquiller les yeux devant cet influx soudain. Le monde sembla basculer, hors de contrôle…

Une terrible explosion d’énergie jaillit de Ragaana. Les forces brutes du Warp cinglèrent la réalité, tandis qu’une onde de choc titanesque se répandait hors de lui. L’air sembla se contracter autour de lui, puis se boursoufler soudainement. Les pavés furent projetés comme de simples fétus de paille. Dakka fut soulevé par l’impact et s’écrasa contre le mur de la maison la plus proche, le dos labouré par les éclairs incandescents. Venria fut balayée par la déflagration, tandis qu’un galet de la taille d’un poing enfonçait le casque de son adversaire.

Les maisons se fissurèrent sous le choc, les poutres craquèrent et s’arquèrent, les vitres éclatèrent. Deux habitations s’effritèrent, et se désagrégèrent brutalement, comme emportées par un ouragan. Les tuiles giclèrent, et les mercenaires postés sur les toits propulsés dans les airs. Constantine fut jeté à terre, rebondissant contre les pavés. Son corps tournoya dans les airs, avant que son dos et sa tête ne heurtent un mur crevassé. Le Géant de Fer bascula en arrière et fit trembler le sol dans sa chute. Zek se cramponna, enfonçant une de ses lames entre les dalles pour ne pas être emporté à son tour.

Puis le maelstrom de destruction reflua. Toute la zone était obscurcie par une fumée dense, et des débris continuèrent de pleuvoir alentour. Les oreilles de Constantine sifflaient. Il tenta de se relever, tituba et retomba lourdement à terre, avant de se diriger d’un pas hagard vers Ragaana. Venria rampait sur le sol, crachant une salive maculée de poussière et de sang. Zek se relevait avec peine, tenant son bras gauche blessé avec sa main droite, haletant, couvert de poussière. Dakka roula sur le côté, sa tête bourdonnant sourdement, clignant des yeux et toussant…

Ils étaient vivants…

Les derniers vestiges de la fumée se dissipèrent, soufflées par les vents marins. Ragaana gisait dans un cratère vitrifié. Son corps nu et fumant était recroquevillé en position fœtale, à demi enseveli sous les décombres. Plusieurs maisons s’étaient effondrées, et rien d’autre à part eux ne semblait bouger au sein des ruines.

Constantine chancela jusqu’au cadavre de l’un des mercenaires, et lui retira son casque. Sur le front du cadavre, bien en évidence, une larme de cristal rouge… Il grimaça de haine, tout comme Venria.

Dakka dévala maladroitement la pente du cratère, l’arme en bandoulière. Il tira le corps inanimé du chaman hors des gravats. Constantine aida Venria à se relever, et la prit par-dessous l’épaule. Malgré son bras bringuebalant, Zek porta assistance au soldat Fedridien pour hisser Ragaana hors de la concavité. Ils errèrent dans les rues dévastées, couverts de poussière et de suie, jusqu’à une taverne non loin de là. Ils défoncèrent la porte et jetèrent quelques Trônes au tenancier, éberlué, tout en brandissant leur passe-droit officiel.

Ils ordonnèrent à l’aubergiste de leur apporter de l’eau, des linges propres, et de leur ouvrir des chambres. Ce dernier s’exécuta promptement. Les acolytes allongèrent le corps meurtri et enfiévré de Ragaana sur une couche, l’empêchant à plusieurs reprises d’avaler sa langue et de convulser. Une fois que le tavernier leur amena des bassines d’eau chaude, ils se débarbouillèrent prestement, tandis que l’hébétement cédait la place à la colère.

Venria demanda à Zek de veiller sur Ragaana. Elle, Constantine et Dakka iraient réquisitionner des troupes pour mener un assaut contre le Mortus-Charonis et débusquer Vestra.

Passant à côté des carcasses des deux autres vaisseaux abattus, ils se présentèrent à la milice avec le document que leur avait remis Orcan. Le capitaine de la garde écarquilla les yeux à la vue du sceau impérial, mais ne se laissa pas impressionner. Il mobilisa rapidement ses hommes, avec une efficacité sans faille. Près d’une soixantaine d’hommes vinrent se tenir dans la cour, en rangs impeccables, sous le regard satisfait des acolytes…

La force de frappe se mit en marche sous de hautes bannières claquant au vent. Soixante soldats en armure de plates complètes, brandissant mousquets laser et épées...

Les portes de l’entrepôt furent enfoncées. Les soldats d’Orcan s’engouffrèrent dans la morgue… Les lasers sifflèrent. Des servitors et des servo-skulls émergèrent des tréfonds de la bâtisse, appuyant la contre-offensive des fossoyeurs, qui s’étaient regroupés après l’attaque infructueuse contre la taverne.

S’ils étaient moins nombreux, les armes en leur possession étaient d’une technologie nettement plus avancée. De nombreux miliciens tombèrent sous les tirs ennemis, leur plastron ou leur heaume éventré par les salves énergétiques. Mais le courage ne leur manquait pas. Ils continuèrent à presser leurs adversaires, et bientôt, ils enjambèrent les carcasses noircies des servitors, écrasèrent les crânes flottants sous leurs bottes, et contraignirent l’ennemi à se retrancher derrière leur dernière barricade. Se voyant dans une situation clairement désespérée, le scribe que les acolytes avaient rencontré leur signifia leur reddition.

Seize morts et une trentaine de blessés… Les pertes avaient été lourdes. Les six prisonniers des Mortus-Charonis étaient agenouillés sous le regard véhément des gardes survivants, mains derrière la tête en signe de soumission, mais leurs yeux demeuraient ouvertement défiants. Les acolytes emmenèrent le scribe dans une pièce et ordonnèrent aux miliciens de ne pas les déranger. Ils le questionnèrent.

L’intendant se montra loquace, en gage de bonne volonté. Il révéla aux acolytes qu’ils avaient été contractés par Coriolanus Vestra, payés rubis sur l’ongle. Vingt-cinq mille Trônes par mois… Les servants de l’Inquisition pâlirent. C’était une somme colossale. Le mercenaire leur avoua être prêt à coopérer, s’ils lui garantissaient la vie sauve en échange. Ils acceptèrent.

Il leur révéla alors avoir été embauchés pour traquer une famille prétendument Void Born, les O’Dientro, mais ils savaient que cette lignée était éteinte depuis des siècles. Celle qui s’était translatée sur Acreage était des imposteurs et n’appartenait pas à l’Imperium. Vestra était intéressé par le fait de retrouver cette dynastie, ou leur progéniture. Or ils savaient que le sang de ces voyageurs coulait chez deux enfants sur Acreage, Sophia et Constantine Narsès.

Vestra était là pour les retrouver. Ils avaient retrouvé la trace de l’un des deux, Constantine, mais l’avaient découverte trop tard. Ils avaient appris qu’il était mort sur une lune pénitentiaire appelée Géhenne, en périphérie du secteur, lors d’un bombardement orbital. Leurs recherches s’étaient alors concentrées sur la fille…

Ils avaient longuement planifié leurs actions, étudié la géopolitique de la planète, financé la rébellion à travers la Maison Rabast, en fournissant aux insurgés, à travers lui, des armes, des munitions, des fonds et des provisions. Il avait tenté de se soustraire à leur influence, mais ils savaient des choses sur lui, notamment ses attraits malsains et ses tendances pédophiles et incestueuses.

Ils avaient soudoyé les clercs de l’Administratum pour retarder la proclamation de Rhozeia en tant que Haute-Reine d’Ascandia, afin de maintenir le climat d’instabilité. Puis s’étaient manifestés à Orcan en tant que prêtres du Mortus pour opérer en toute légalité et noyauter la planète.

Rabast avait tenté de se rebeller à nouveau, mais ils avaient pris le soin de kidnapper Magdalene, sa fille, pour le museler définitivement. Pris au piège, ce dernier les avait alertés lorsqu’il avait eu vent du retour de Constantine. Il avait été prévenu par Rhozena, et les avait tout de suite tenus informés, en tentant de négocier la libération de sa fille.

Ils savaient énormément de choses. Des informations capitales qu’ils pouvaient exploiter, en échange de leur libération. Par exemple, qu’Orcan était un bâtard des Narsès, le fils illégitime de Belisarius… A cette révélation, il lorgna du côté de Constantine et sourit.

Sous son masque, Constantine blêmît devant toutes ces révélations. Pourquoi Coriolanus Vestra les recherchaient-ils, lui et sa sœur perdue ?

Venria lui demanda où était le prêcheur hérétique. Le mercenaire lui révéla qu’il avait installé ses quartiers dans l’ancien palais Narsès, dans les terres maudites. Mais alors qu’elle lui demandait pourquoi ils dérobaient les morts, il se rendit compte que les acolytes n’avaient nullement l’intention de les libérer. Elle réitéra sa question, mais l’homme demeura muet. Elle lui décocha une gifle. Pourquoi subtilisaient-ils des cadavres ? Le scribe se coupa soudain la langue et recracha le morceau sectionné. Il sourit, malgré ses spasmes et sa douleur, du sang coulant sur son menton.

De son côté, Dakka apprit par Boucles d’Or et Plex que cinq vaisseaux de descente atmosphérique aux couleurs du Mortus étaient arrivés sur l’Île de l’Empereur sans autorisation impériale. Deux cent cinquante hommes en étaient sortis et avaient embarqué sur un navire, l’Almighty Sun, et prenaient la direction d’Olrankan.

Les acolytes parvinrent à faire parler un autre prisonnier. Ils avaient averti leur hiérarchie de la visite des acolytes à l’entrepôt, et des renforts avaient été envoyés promptement. Ils ne tarderaient pas à arriver… L’Almighty Sun disposait d’un équipement technologique le rendant invisible aux Géants de Fer qui écumaient les marais de l’ancien domaine Narsès, et c’est ainsi qu’ils s’y rendaient sans encombre.

Mais alors qu’ils allaient pour planifier et préparer leur intervention, un lieutenant de la Garde Palatine fit irruption dans la pièce, suivi de six soldats d’élite. Orcan entra à son tour, furieux, et fustigea les acolytes du regard. Des vaisseaux, dans sa ville ? Il passa à côté de Constantine sans lui prêter attention, et leur somma avec véhémence de lui expliquer ce qui se passait.

Constantine fit profil bas, le visage dissimulé derrière son masque. Son cœur battait la chamade, tandis que ses doigts se crispaient sous le coup de la tentation. Il aurait été si facile de le tuer, à cet instant précis. Mais les idées se bousculaient dans sa tête. Cet homme était son demi-frère…

Dakka prit les devants. Il expliqua à Orcan que des hérétiques sévissaient actuellement en Ascandia. Ils s’excusaient de la gêne occasionnée, mais leur action était sanctifiée par l’Imperium, et devait être poursuivie, jusqu’à la destruction des traîtres. De vils apostats avaient trouvé refuge dans les terres maudites, et certains étaient actuellement en route pour Olrankan depuis l’Île de l’Empereur, et causeraient encore plus de destruction. Il fallait agir vite pour déjouer leurs plans.

Le Régent, loyal et dévoué sujet de l’Empereur, y vit une nouvelle occasion de briller et de se montrer magnanime. Il fit en sorte d’allouer plus de moyens aux acolytes, tout en se rassérénant des excuses formulées à son égard. L’Inquisition lui faisait part de ses excuses ? Son ego ainsi flatté, il quitta la pièce, intimant à ses lieutenants de se préparer pour la guerre. Peut-être la Sainte Inquisition accorderait-elle sa bénédiction sur ses projets de croisade contre Evaness, qui sait ?

Avec l’autorisation d’Orcan, le Pellenshir vint chercher les acolytes en pleine mer, loin des regards du bas-peuple. Plex et Boucles d’Or étaient entrés en contact avec Strygos et ses compagnons, et un lieu de regroupement avait été défini, pour leur permettre d’organiser une offensive commune sur les forces de Coriolanus Vestra.

L’assaut final pourrait bientôt débuter…

jeudi 26 novembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.4




Ragaana cracha dans l’épaisse pâte verdâtre et fétide et touilla énergiquement. Il recueillit une boule d’onguent visqueux au creux de ses doigts et l’étala sans ménagement sur les brûlures de Venria. Celle-ci le regarda faire avec une moue écœurée. Dakka lorgnait discrètement à travers la fenêtre, collé contre le mur, tandis que Constantine se massait les tempes. Zek les observait attentivement. Depuis qu’il les accompagnait, il avait relevé à de maintes reprises des messes-basses, des regards en coin, des silences… Comme si on lui cachait quelque chose.

Il tira une nouvelle lame et entreprit de l’affuter. Une chose était sûre : quelqu’un voulait capturer Constantine vivant. A sa mine déconfite, lui-même ne devait pas en connaître la raison… Shling. Shling. Le bruit de la lame sur la pierre à aiguiser était apaisant, et lui permettait de se concentrer.

Constantine fixa Zek, assis de l’autre côté de la pièce. Le vacarme causé par l’affutage de ses armes lui fit serrer les dents, et il lui aurait bien demandé de cesser s’il n’avait eu conscience de la probable nécessité de sa petite besogne pour les jours à venir. Oui, ils devaient être prêts, rester alertes…

Sur le port, des prêtres-fossoyeurs chargèrent quelques corps blafards sur un chariot. Les malheureux s’étaient noyés dans le tumulte du phénomène Warp. Par leur faute… Mais les citadins ne parlaient que du terrible Horloc, venu pour dévorer les nobles qui troublaient son sommeil avec leurs guerres incessantes.

Des disparitions inexpliquées, des mercenaires hors-monde au service de Vestra et alimentant les rebelles, des fossoyeurs stipendiés Void Born engagés par Orcan… Un sombre pressentiment naquit dans l’esprit de Constantine, à la lueur des corrélations qui pouvaient exister entre ces éléments. Ils devaient être sûrs.

Il fit part de cette idée aux autres acolytes… Mais où pouvaient-ils commencer leur enquête sans éveiller trop de soupçons ? La cour était un lieu de départ idéal, mais présentait trop de risques pour Constantine. Se rapprocher trop vite des prêtres Void Born serait peut-être suicidaire… Il fallait enquêter de manière périphérique. La morgue pouvait constituer un bon lieu, pour un début.

Ils quittèrent leur repère sans faire de vague, et se dirigèrent vers les chambres mortuaires. Ils les trouvèrent sans difficulté, mais la progression fut laborieuse. Ils durent longer les rues dévastées, à moitié recouvertes de décombres, de cendres et de sang. La pluie n’était plus qu’une fine bruine, mais les écoulements avaient laissé entre les pavés défaits des mares boueuses et parfois rougies, là où un cadavre gisait encore.

Des hommes et des femmes hagards erraient, certains à la recherche d’autres survivants parmi leurs amis, leur famille… Tout n’était que ruine et désolation.

Les grilles austères de la morgue étaient entrouvertes. Ils entrèrent dans la sombre bâtisse, goûtant un air moite et stagnant, et saturé de naphtaline. Un employé siégeait à un bureau, près de l’entrée. Il était visiblement oisif, et son regard trahissait de l’étonnement en voyant les acolytes entrer. Il leur révéla qu’ils avaient peu de visiteurs, ces temps-ci. Vivants ou morts, d’ailleurs. De plus en plus, les corps étaient directement pris en charge par les prêtres du Mortus-Charonis.

C’était son collègue qui était à l’accueil le jour où ils étaient venus les trouver. Lui était en train d’écumer la ville à la recherche de solutions chimiques, qui se faisaient rares, ces temps-ci. Il lui avait dit que des prêtres à la pâleur morbide et aux traits émaciés étaient venus et avaient embarqué les corps. Les catacombes étaient vides. Vides ! Mais il ne pouvait rien faire, ils avaient une autorisation impériale… Et ils ont demandé à ce qu’ils leur livrent tous les cadavres qu’on leur amènerait. Mais ils en ont gardé quelques-uns, bien sûr. Il fallait bien vivre…

Les acolytes descendirent dans les chambres mortuaires à la lueur des flambeaux. L’autre médecin-légiste était en train de disséquer le corps d’un jeune homme. Interrogé sur les fameux prêtres, il leur révéla tout ce qu’il savait. Ces derniers arboraient une sorte de larme étrange sur le front, une sorte de bijou cristallin. Ils s’étaient installés dans la ville, aussi. Au vieux moulin et dans les entrepôts avoisinants. C’est là qu’ils conservaient tous les corps, en attendant qu’un bateau arrive pour tous les emmener. Et qu’advenait-il des cadavres ? Il n’en savait rien, mais il avait entendu dire qu’ils les amenaient dans les étoiles pour les immoler dans le feu des soleils. A leurs yeux, les astres étaient des fenêtres vers l’âme immortelle de l’Empereur-Dieu.

Mais alors qu’ils étaient en train de discuter, les acolytes virent le drap couvrant pudiquement le cadavre sur lequel le médecin était en train de travailler glisser lentement, tandis que la forme s’animait. Des mouches et des moustiques innombrables se mirent à voleter frénétiquement dans les catacombes. Le trépassé se relevait, déversant le contenu de sa cage thoracique sur le sol dans un bruit de succion dégoûtant.

Ses mains décharnées se refermèrent sur le malheureux docteur, qui hurla de terreur, tandis que ses dents jaunies arrachaient sa gorge dans un geyser écarlate. Les acolytes brandirent leurs armes et firent feu sur la créature maudite. Un de ses bras tomba au sol, arraché par le shrapnel du fusil à pompe de Venria. Les autres tirs firent éclater ses organes, qui pendaient mollement de son abdomen entrouvert. Mais le mort-vivant se contenta de les regarder, un sourire peint sur son visage. Peint en sang frais, qui dégoulinait sur son menton et sa gorge…

Une de ses jambes fut arrachée à son tour par la violence des tirs. Il s’effondra, et se mit à ramper… Ses yeux mornes étaient fixés sur eux. D’une voix gutturale et chuintante, il parla.

- Je sais qui vous êtes. Il ne serait pas déraisonnable de travailler ensemble…

Un coup de fusil de Dakka lui explosa la tête dans une gerbe de sang noirâtre, de chair putréfiée et de matière cérébrale. Le Fedridien cracha sur le cadavre. Reste mort et fais pas chier !

Les moucherons se muèrent en cendres noirâtres, en poussière, avant de disparaître. L’autre médecin arriva en courant et hurla de terreur en voyant la scène. Il resta prostré dans un coin, alors que les serviteurs de l’Inquisition quittaient la morgue.

Partout où ils allaient, les morts avaient une fâcheuse tendance à vouloir se relever…

Le moulin abandonné se dressait encore, lugubre, au milieu des entrepôts déserts et éventrés par les boulets de canon. Ses quatre pales détériorées étaient immobiles, les membranes de tissu étripées, et crissaient faiblement… Les citadins avaient déserté cette zone trop proche du port pour se réfugier dans les hauteurs de la cité.

Les acolytes entrèrent dans la morgue du Mortus-Charonis, située dans un entrepôt, et se retrouvèrent nez-à-nez avec un homme de haute stature, au teint pâle, et arborant une larme de cristal rouge sur le front. Il était penché sur un lourd registre, qu’il ferma à leur entrée. Il n’avait pas sur lui le manteau noir de sa fonction, mais au contraire, était vêtu d’atours noirs aux dentelles délicates. Il n’avait pas l’apparence d’un prêtre, mais plutôt d’un intendant d’une riche lignée marchande…

Ainsi, le commerce des morts était rentable…

Deux servo-skulls vinrent bourdonner autour de sa tête, lorgnant de leurs orbites creuses, dans lesquelles étaient enchâssés des focales augmentiques, les nouveaux arrivants. Les yeux sombres de l’intendant pétillèrent d’une étrange excitation.

- Messieurs, Madame. Que puis-je pour vous ?

Les acolytes pouvaient entendre le bourdonnement de machines dans l’entrepôt. Des recycleurs d’air, des modules de refroidissement… Ces mercenaires avaient un équipement de pointe. Un servitor chromé poussant une palette antigrav passa à côté d’eux, avec un cadavre allongé dessus, avant de se diriger vers les chambres froides.

Constantine se tenait en retrait derrière ses compagnons, ses traits cachés sous un masque pour éviter que quiconque ne le reconnaisse. Mais même de là où il se trouvait, il pouvait ressentir l’étrange tension et la trépidation du scribe. Comme l’appétit d’un prédateur devant une délicieuse proie.

Venria s’avança.

- La curiosité, en grande partie. Nous sommes de retour depuis peu sur Acreage, suite au décès d’un proche, mais nous avons été étonnés de trouver la morgue vide. Nous avons été aiguillés vers vous…

Le sourire de l’intendant grandit encore un peu plus.

- Je comprends. Nous faisons partie du Mortus-Charonis, un ordre monastique qui offre ses services à ceux dans le besoin. Nous sillonnons le secteur pour aider à juguler les épidémies, qui ne manquent pas d’accabler la population des contrées en guerre, si l’office des morts n’est pas bien réalisé. Dans de nombreux cas, les autorités compétentes sont vite débordées. Nous les assistons.
- Contre paiement, j’imagine.
- En effet.
- J’ai entendu dire que vous aviez une bien curieuse manière de vous occuper des morts.
- Nous offrons nos services, mais dans le respect de nos croyances. Je sais que certains détracteurs considèrent que nous n’offrons pas les derniers sacrements adaptés. L’usage voudrait que nous les immolions, mais cela est néfaste pour la santé des vivants. Nous préférons les offrir au feu des astres, qui dans notre foi, sont les yeux de l’Empereur-Dieu. C’est un honneur immense de se voir ainsi offrir au feu primal…

Les acolytes demeurèrent un temps silencieux, digérant l’information. Une terrible prémonition vit le jour dans l’esprit de la Sororitas, qui demeure comme tétanisée.

- Vous recherchiez un proche, n’est-ce pas ? Peut-être pourrais-je vous renseigner ?
- Non, je suis sûre que vous lui avez accordé les onctions nécessaires. Votre professionnalisme est manifeste…

Les acolytes se détournèrent, tandis que le scribe souriait toujours.

Ils regagnèrent la taverne en hâte. Venria semblait inquiète, mais refusait obstinément de se livrer tant qu’ils n’étaient pas à l’abri. Ils ne firent pas attention au servo-skull qui planait au-dessus de leur tête à plusieurs mètres de hauteur…

Zek referma la porte et la verrouilla, tandis que Venria commençait déjà, paniquée, à leur faire part de ses suppositions. Coriolanus Vestra proclamait être le prophète de l’Astre Tyran, du soleil noir ! Et ces mercenaires-fossoyeurs, que faisaient-ils ? Ils livraient des cadavres au soleil du système. Cela ne pouvait être une coïncidence… Cela voulait aussi dire que quelque chose de sombre se préparait. Un rituel démoniaque ? Appelaient-ils l’Astre Tyran de cette manière ?

Dakka repensa à Mara et en eut des sueurs froides. Il revit l’astre en train d’être dévoré par la sphère noire, et se demanda s’il n’y avait pas de rapport… Mais il le garda pour lui, incapable de reparler de cette expérience traumatisante.

Zek secoua la tête. Il n’était pas convaincu par la thèse de Venria. Le Mortus-Charonis était un culte légitime, qui agissait dans de nombreux systèmes voisins. Et personne n’avait détecté de phénomène étrange jusque-là. Des cadavres envoyés dans un soleil ? Quel mal cela pouvait-il faire ?

Ragaana n’avait que trop conscience des éventualités. Les idées se bousculaient dans sa tête. Et le diable était précisément dans ces possibilités innombrables. Ils devaient avoir plus de détails, si rituel il y avait, pour définir clairement leurs intentions…

C’est alors qu’ils entendirent le bruissement ténu de moteurs… Dakka se posta à la fenêtre, pour voir ce qu’il se passait. Il vit trois transports de troupes aériens foncer droit vers eux, à pleine vitesse, depuis le nord-ouest. Un vacarme assourdissant déferla dans les rues, faisant trembler le verre des vitres, tandis que les batteries antiaériennes de la ville-forteresse ciblaient les intrus.

Elles se frayèrent un chemin entre les déflagrations, volant bas pour éviter les tirs et frôlant les toits. L’une d’elles se stabilisa au centre du port, et ses portes s’ouvrirent. Des hommes armés descendirent sur la place le long de cordes, alors que des passants hurlaient de terreur ou demeuraient cloués sur place, tétanisés par la peur. Pour la majorité d’entre eux, c’était la première fois qu’ils voyaient un vaisseau, et ils devaient leur apparaître tels des dragons de légende, vomissant des flammes bleutées depuis leurs réacteurs, comme des gueules incandescentes.

Les bateaux tanguèrent sous le souffle des réacteurs, et des vaguelettes concentriques fendirent les eaux de la baie. Le vent cinglait violemment les malheureux témoins de l’arrivée des vaisseaux, alors que les mercenaires se dispersaient pour encercler la taverne. Ils savaient où ils étaient !

Constantine reconnaissait leurs uniformes. Gainés de cuir renforcé de plaques de céramite, arborant des respirateurs et des lunettes de vision qui couvraient l’intégralité de leur visage, brandissant des armes sophistiquées et des pistolets à aiguilles sûrement chargés de produits soporifiques…

Les mêmes hommes qui les avaient attaqués quelques heures plus tôt…

Les deux autres transporteurs passèrent au-dessus de la taverne, et les vitres, les murs, le sol, le plafond vibrèrent. Les acolytes empoignèrent leurs armes en hâte afin de déguerpir. Déjà, des hommes de la milice se précipitaient sur la place, accompagnés de géants mécaniques pour faire face à l’intrusion. Les tirs résonnèrent… Constantine se précipita dans les escaliers, dévalant les marches, heurtant les murs dans sa précipitation.

C’est alors qu’ils enfoncèrent la porte de la taverne.

mardi 24 novembre 2009

DARK HERESY – MAGGOTS IN THE MEAT : RESUME, PART.3



Les acolytes sont discrètement raccompagnés à Regalia. Constantine semble soucieux tout au long du périple, mais préfère demeurer silencieux. Tout à leurs pensées, ils ne s’aperçoivent pas qu’une silhouette est en train de les observer depuis le port… Celle-ci les regarde monter dans leur navire, avant de se détourner.

Ce n’est qu’une fois en sécurité sur l’Iron Duke et durant l’absence de Zek qu’il fait part à ses compagnons de ses découvertes, et de son souhait d’aider les insurgés tout en restant dans le cadre de leur mission.

Mais les autres acolytes sont prêts à aller plus loin. Pourquoi ne pas se débarrasser d’Orcan ? Constantine a une dette de sang à collecter, et presque tous s’accordent à dire qu’il ne faut pas laisser les choses inachevées. Surpris mais encouragé, Constantine se met à réfléchir aux possibilités. Il ne souhaite pas dévier de leur mission. C’est elle qui passe avant tout… Mais s’il y avait un moyen de le discréditer, de l’accuser de trahison…

Les autres ne se montrent pas aussi délicats. Il est toujours possible de le défier par les armes ou l’assassiner. Ils disposent de l’autorité de l’Inquisition. Nul ne viendrait questionner leur acte. Venria et Ragaana semblent favorables à cette idée. Dakka est le seul à être résolument contre, mais il ne les laissera pas tomber pour autant. La piste de la corruption de l’Archevêque Varinius est prometteuse, et l’Empereur-Dieu sait qu’ils ont une dent contre le Ministorum… Mais au gré de la discussion, alors qu’ils digressent vers les actes unilatéraux et condamnables de l’Ecclésiarchie, la voix d’Horus s’impose à l’esprit de Ragaana.

Si vous faites cela, vous vous abaisserez aux mêmes bassesses que le clergé. Si vous intervenez et faites preuve d’ingérence, vos actions ne vaudront pas mieux que celles que vous condamnez…

Ragaana serre la mâchoire. Il sait que ces paroles viennent d’un esprit corrompu, mais elles sont sages, il doit l’admettre. Il se tourne vers Constantine.

- Hé, Constantine-là, j’pense qu’en fait que Dakka il a raison, hein. C’est pas bien si on agit là.

Constantine toise Ragaana, se demandant pourquoi il a si vite changé d’avis. Mais il se rend vite compte qu’il a raison. Un sourire désabusé se peint sur son visage. Qu’il était facile de basculer à nouveau… Oui, Ragaana avait raison. Il ne fallait pas se laisser distraire de leur véritable objectif.

Entretemps, Zek fait un rapport à Ark-Ashtyn, et demande à faire exécuter un faux de l’Hereticus Tenebrae Propheticum, avec des passages totalement inventés. Ils n’ont décelé aucune activité de culte significative. Cela veut peut-être dire que Vestra est ici pour autre chose. Peut-être a-t-il trouvé la trace d’autres fragments du Requiem de Jaeger Sebastus Black ?

L’Iron Duke appareillera au matin pour remonter le Canal de l’Aquila vers Olrankan. Les acolytes se séparent donc pour continuer d’enquêter à Regalia, afin de ne négliger aucune piste, même s’ils se doutent que Coriolanus Vestra ne s’est nullement attardé en ce lieu.

Alors qu’ils interrogent les sentinelles ayant officié à la surveillance des portes de la ville, un émissaire vient trouver Dakka et Ragaana. Il se présente comme un envoyé d’Orcan, qui les invite à se rendre à son palais. Les deux acolytes acceptent.

Ils sont amenés dans une clairière, à plus d’une heure de Regalia. Un vaisseau les y attend pour les amener à Olrankan. Entourés de gardes vêtus d’armures de plates mais arborant des fusils laser, ils sont escortés depuis le spatioport du palais jusque dans les appartements du Régent.

Orcan les y attend devant une grande carte d’Acreage. Y sont dessinés les Duchés d’Ascandia, mais aussi les Royaumes d’Orient, jusqu’en Evaness. Le Régent vient les accueillir chaleureusement, et leur demande la raison de leur venue en Ascandia. Doit-il s’inquiéter ? Ont-ils besoin d’aide ? Il leur donne un mandat impérial leur permettant de disposer de toute latitude pour leur mission. Mais cette générosité n’est pas totalement dénuée d’intérêt. Rapidement, il devient clair qu’il tente de les convaincre de lui rendre un petit service. Il souhaite les aiguiller sur une hérésie manifeste : en Evaness subsistent des coutumes animistes qui incitent la population à vénérer et idolâtrer des ‘forces de la nature’, la fertilité, la mort, le ciel, la terre, sous forme d’icones. Il serait bien sûr disposé à les assister dans l’éradication de ces pratiques déviantes…

Dakka et Ragaana le remercient de sa diligence, tout en notant qu’ils sont dans une position idéale pour l’éliminer. Mais ils se contentent de prendre congé de lui et de regagner Regalia. Ils sont fiers d’eux. Ils ont une autorisation pour enquêter de la part des forces de police, et dans les cas extrêmes, un mandat signé par le Régent leur permettant même de réquisitionner des forces armées…

Au matin, l’Iron Duke quitte le port et s’engage dans le Canal de l’Aquila qui relie la Mer des Brumes à la Mer des Cendres. Les acolytes regardent les falaises les toiser de toute leur hauteur. Les parois ont été façonnées par les hommes, et les légendes disent que c’est l’Empereur-Dieu qui aurait scindé la terre pour relier les deux mers et apporter Sa lumière aux peuples d’Ascandia. Riles Lytir leur révèle que le caractère sacré de cette brèche empêche les belligérants de combattre à proximité, et nul n’aurait la folie de souiller cette œuvre divine.

A la mi-journée, ils jettent l’ancre dans une crique, et Lytir leur annonce que c’est là qu’il a laissé les personnes que ses hôtes recherchent. La crique artificielle a été spécialement conçue pour permettre aux navires de se croiser. Ils en ont vu de manière régulière tout le long de la voie fluviale. Une berge de pierre a été érigée, comme un quai, et un escalier tortueux menant en haut de la falaise a été construit dans la roche. Le capitaine leur dit qu’ils ont déchargé leurs caisses, et que des hommes les ont emmenées en haut. Mais il ne sait rien de plus…

Les acolytes demandent au capitaine de l’Iron Duke de les attendre, et gravissent les marches. Ils découvrent un paysage champêtre. Des champs, entourés de bois touffus, quelques chaumières… Si des hommes sont passés par là, les paysans ont sûrement dû voir quelque chose.

Ils remarquent un paysan qui cultive son champ. Ce dernier les regarde arriver avec appréhension et se cramponne à sa faux. Les acolytes le questionnent : a-t-il vu des individus monter des caisses depuis la crique ? Il nie, mais ils se rendent vite compte qu’il ment. Ils se font plus menaçants. Sa ferme est en face de l’accès. Il n’a pas pu ne pas les voir. Alors qu’ils sortent leurs armes, le fermier lâche sa faux et se prosterne. Oui, les caisses ont été amenées au village, à quelques kilomètres d’ici. Elles ont été livrées à un certain Herel, le fils du forgeron…

Les acolytes vont trouver ce fameux Herel. Après une brève altercation, ils l’interrogent. Il a une cache d’armes sous sa forge, et il alimente les rebelles. Son père a été tué par les Angelus, et il mène la résistance locale. Des armes lui sont livrées de la sorte pour encourager ses efforts de guerre… Il ne sait rien de Vestra, simplement qu’un autre navire est venu les chercher pour les emmener vers le nord.

Constantine se montre compréhensif. Sa propre mère a été violée et tuée par Balian Angelus… Il le laisse partir. Mais la nouvelle est terrible. Coriolanus Vestra est en lice avec les hors-monde qui fournissent à Rabast, et à travers lui, aux insurgés, des armes et des provisions…

Ils continuent leur voyage. Les eaux sombres du canal deviennent boueuses, tandis qu’il s’évase petit à petit. Ils entrent dans la partie marécageuse de la Mer des Cendres, avec ses brumes âcres et l’odeur de la décomposition. Alors que le ciel s’assombrit, Olrankan se dévoile à eux. Constantine serre les dents en voyant la cité. Hideuse, infâme…

Là aussi, la guerre a prélevé son tribut. Des maisons ont été détruites par les tirs de canons. Des murs gisent brisés sur le sol. Des quartiers entiers semblent avoir été la proie des flammes et fument encore malgré la pluie… Et l’eau est noire : les cendres charriées par les rigoles, les égouts et les caniveaux se déversent dans le port. La ville empeste. Des cadavres sont entassés le long des grèves par les silhouettes encapuchonnées des mêmes prêtres Void Born qu’ils ont vus à l’astroport.

Pour l’heure, il semble que la flotte d’Orcan a réussi à repousser un nouvel assaut maritime des renégats. Un calme désabusé enveloppe la ville. Une torpeur faite de peur, de mort, de souffrance… Tous savent que ce répit ne sera que de courte durée…

Alors qu’ils accostent, les cloches résonnent dans la ville, qui se vide en quelques instants. Les volets se ferment, les passants se hâtent… Une patrouille intime aux acolytes de se presser de déguerpir. Il semble qu’un couvre-feu ait été instauré dans la capitale. Ils gagnent une auberge et s’y installent pour la nuit, regardant les rondes fréquentes des gardes depuis leur fenêtre. Ils parviennent ainsi à apercevoir les fameux Géants de Fer d’Orcan, de massifs golems mécaniques façonnés de manière grossière, à demi rouillés à cause de l’humidité ambiante, et qui errent dans les rues en quête d’infractions et de potentiels contrevenants, prêts à faire feu à la moindre menace. Seuls les prêtres Void Born semblent autorisés à officier malgré le couvre-feu.

D’après le tavernier, les nobles sont à cran. Il y a des disparitions inexpliquées, qu’on dit. Certains hauts dignitaires se sont volatilisés sans laisser de trace, et tous craignent pour leur vie. Il révèle aussi aux acolytes qu’Orcan a permis à des prêtres venant de très loin de s’occuper des nombreux morts causés par la guerre. Des sortes de mercenaires-fossoyeurs, qui se chargent des cadavres, et évitent que la maladie ne se propage. Des étrangers, qu’on paie pour cette besogne. La grogne est manifeste : ils ne brûlent pas les corps, comme l’exige la coutume, mais les emmènent on ne sait où. On murmure même qu’ils les mangent…

Avant de se coucher, les acolytes se mettent d’accord pour cacher la présence de Constantine aux autorités et ébruiter leurs interventions le moins possible. Attirer l’attention serait dommageable pour leur investigation.

La nuit est bien avancée lorsque Constantine est réveillé par des bruits ténus dans le couloir. Soudain, la porte de sa chambrée est enfoncée, et des soldats masqués entrent, pointant vers lui des pistolets à aiguilles. Il parvient à se cacher derrière son lit et entend les ergots siffler et se ficher dans le matelas. Il appelle à l’aide.

Le combat est confus. Les acolytes luttent contre une dizaine d’hommes résolus et bien équipés. Des mercenaires vraisemblablement hors-monde. S’ils utilisent des aiguilles face à Constantine, ils ne font pas preuve de retenue vis-à-vis des autres. Pourquoi le veulent-ils vivant ?

Les pensées de Constantine se bousculent dans son esprit. Orcan aurait-il découvert sa présence ? Non, il chercherait à le tuer et non le capturer. Qui plus est, aurait-il le cran de s’en prendre à des acolytes de l’Inquisition ? Serait-ce Vestra ? Mais dans ce cas, pourquoi le vouloir vivant ?

Les acolytes se débarrassent difficilement des stipendiés. Dans le tumulte, ils sont séparés, et fuient en entendant la garde approcher. Blessés, Venria et Dakka cherchent à se cacher. Un homme leur ouvre la porte et les presse de rentrer. Constantine et Ragaana se dissimulent dans les égouts. Tous deux se fraient un chemin vers le bas de la ville. Vers le port, dans l’espoir de regagner l’Iron Duke.

L’homme cache Venria et Dakka dans son cellier, derrière un établi. Il dit que tous les ennemis d’Orcan sont ses amis, et remonte. Ils entendent la milice, la fameuse Garde Palatine, fouiller les maisons une par une. Ils ne font pas dans la demi-mesure, et maltraitent les habitants sans vergogne. Leur sauveur est lui aussi violemment battu pour avoir répondu trop lentement à leurs semonces. Des gardes descendent dans la cave, mais ne remarquent pas la pièce secrète. Exaspérés par leurs recherches infructueuses, ils décident de mettre le feu à toutes les maisonnées avoisinantes. Si personne n’a rien vu, c’est qu’ils sont tous complices !

Venria et Dakka entendent de l’huile être versée sur le plancher, juste au-dessus de leurs têtes. Le liquide coule à travers les interstices. Ils tentent de forcer la porte de leur cachette, mais impossible, des barils de vin obstruent le passage. Avec leurs armes, ils font sauter le verrou et percent les barils pour alléger le poids des tonneaux, tandis que les flammes et la fumée se disséminent dans la bâtisse. Mais ils ont perdu beaucoup de temps, et le feu s’est répandu à une vitesse terrible.

Des poutrelles de bois enflammées tombent, les murs embrasés craquent et s’effondrent. Ils découvrent le corps de leur bienfaiteur consumé par les flammes ardentes. Mais ils n’ont pas le temps de s’apitoyer, ni de maudire les actes barbares de la Garde Palatine. Ils parviennent à sortir dans la ruelle arrière, esquivant les bouts de charpente carbonisée qui s’abattent tout autour d’eux, toussant furieusement, leurs poumons en feu.

Malheureusement, la garde s’était répartie pour repérer d’éventuels fuyards. Un milicien les voit sortir et s’apprête à hurler. Mais une lame apparaît au niveau de sa gorge et trace un sillon écarlate sur son cou. L’homme s’effondre en se noyant dans son propre sang. Zek se tient derrière lui.

Ils gagnent tous les trois les égouts putrides, et filent vers le port. Ils y retrouvent Ragaana et Constantine, qui se sont cachés un bon moment dans une barque recouverte d’une bâche pour échapper à la vigilance de la milice. Mais ils sont tous gravement blessés.

Ragaana invoque la clémence de l’Empereur-Dieu pour les guérir, mais ses pouvoirs échappent à son contrôle. Les foudres du Warp se déchaînent, tandis que pendant un court instant, la gravité s’inverse… L’eau, les bateaux, les caisses… tout chute brusquement vers le ciel sur une centaine de mètres alentour, avant de retomber avec fracas.

L’eau qui s’est surélevée se déverse sur les acolytes, qui sont aspirés par la masse liquide alors qu’elle retombe. Ils ne savent plus où est le haut et le bas… et sont en train de se noyer. Certains trouvent enfin la surface, et aident les autres, haletants, à remonter sur les pontons…

Dans tout ce capharnaüm, les acolytes passent inaperçus, tandis que de nombreux spectateurs horrifiés se pressent sur le port dévasté. Des murmures parcourent déjà l’assistance : le Horloc ! C’était le Horloc !

Des bateaux gisent à moitié sur les quais, d’autres sont enchevêtrés. Alors qu’ils regagnent l’Iron Duke, ils découvrent que celui-ci est aussi en sale état. Sa coque a été percée, et Lytir fulmine, même s’il est encore sous le choc de ce qui vient de se passer. Son navire nécessite des semaines de réparation…

Les acolytes trouvent refuge dans une auberge du port, et pansent leurs blessures. Tout le monde est trop choqué pour leur prêter la moindre attention… Ils sont soudain las, et la fatigue d’une nuit trop courte se fait sentir. Ils ont pu avoir un avant-goût du règne de terreur d’Orcan, c’est un fait. Mais plus que tout, une question les ronge. Qui étaient ces mercenaires ? Et que voulaient-ils à Constantine ?